Chronique de La Folie Almayer, de Chantal Akerman – L’humeur des Atreides

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La Folie Almayer  sonne comme le titre d’un film de F.J. Ossang. Quelque part entre Le Trésor des Iles Chiennes et L’Affaire des Divisions Morituri. Mais laissons-le à C. Akerman et même J. Conrad qui baptisa ainsi son premier roman.

Il est des titres qui, similaires à des rêves prémonitoires, nous projettent dans un imaginaire qui se mêle au notre, révélant alors l’un des grands plaisirs du spectateur ; celui de l’anticipation. D’aucuns s’y refusent, ignorant le nom du film jusque devant la salle. Au fond ils le savent très bien mais s’en préservent, jadis agacés que leur attente, créée en eux par un simple nom, imaginait une œuvre supérieure à celle qu’ils allaient voir. D’autres, au contraire, le scandent haut et fort pour mieux marquer la maitrise de sa diction. Et puis il y a ceux qui ne veulent rien dévoiler, murmurant l’intitulé du film avec pudeur, comme un secret intime. Les plus timides prendront leur billet au distributeur automatique.

A l’Elysée Lincoln, ce soir là,  je me suis retrouvé seul avec Almayer, coincé sur le bord d’une rivière, à contempler sa folie. (J’appris, plus tard, que le Lincoln est une salle estampillée Télérama or le film n’a pas eu bonne presse dans l’hebdomadaire riche en programmes TV).

C’est le capitaine Lindgard, Aguirre des rivières d’Orient, qui a su convaincre Almayer d’épouser sans amour sa fille adoptive malaise, dans le but d’hériter de sa fortune. De ce désamour naitra Nina. Bistre, il faudra qu’elle soit blanche. Et du capitaine nous n’entendrons plus parler ou presque aux prises avec mille aventures que l’on ne verra jamais.

La plus grande folie d’Almayer est sans doute sa plus grande lucidité ; attendre. Attendre constamment dans cette baraque de bois humide le retour du capitaine ou celui de sa fille. Quand Lindgard lui rend visite c’est pour emmener Nina, en ville, dans un pensionnat où elle écoutera du Chopin plutôt que les borborygmes locaux. Almayer pleure mais croit se sacrifice nécessaire. Il ne bougera pas, jamais même, homme d’un lieu, d’une maison sur la rive, lui, qui parle de tant d’ailleurs.

Almayer selon Akerman c’est le portrait tragique de l’européen moderne. Son déracinement en terres équatoriales ne fait que mettre en exergue son déracinement dans l’Histoire. Il ne prévaut pas. Pris entre les vieilles eaux malades d’une Europe conquérante, celle de Lindgard, et les eaux mélangées de sa fille pour qui l’Europe n’évoque rien, Almayer vit sur les vestiges d’une civilisation. Ne parlons pas de décadence, tout c’est déjà écroulé, Lindgard est mort. Almayer n’a pas eu cette chance,  dernier de sa tribu à se souvenir de l’Europe lointaine. Premier spectateur de sa désolation, il est hors de l’action, hors de l’Histoire.

C. Akerman se pose ainsi en parfaite tragédienne exposant ces enjeux, sans jugement, avec une scansion du temps toute remarquable, sans oublier cette part de fantasmagorie nécessaire à la digestion du film. Plus haut, nous évoquions Ossang dont le fil de l’eau de Dharma Guns n’est pas si éloigné de celui de la mangrove d’Almayer. Deux tragédies, deux dérives, qui contemplent nos gouffres.

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Sortie prochaine du LP Morituri chez Euthanasie Records

En attendant des infos plus précises du label Euthanasie qui ne devraient tarder, vous pouvez admirer ci dessous la maquette de la future pochette !

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Réalisation : Sébastien Morlighem

 

 

 

 

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Conversation avec FJ Ossang – Pop en Stock

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Conversation avec F.J. Ossang. Dix questions arrachées au chaos

Crédit: (@ Pierre Roussel)

Soumis par Simon Laperrière le 08/02/12

 

Cinéaste de l’extrême, F.J. Ossang s’est mérité ce titre dès L’affaire des divisions Morituris, son premier long métrage réalisé en 1984. Le réalisateur d’origine française y expose déjà son univers bien à lui avec un cocktail molotov de polar et de science-fiction où se croisent des références à l’impressionnisme d’Epstein, à la musique punk et à Burroughs. Les films qui suivront, Le trésor des îles Chiennes (1990), Docteur Chance (1997) et Dharma Guns (La succession Starkov) (2010) lui servent de laboratoire où narration, esthétique, poétique et histoire du cinéma sont confrontées à l’énergie beatnik, le carburant de l’artiste qui oeuvre également en tant qu’écrivain et musicien.
Suite à son passage à Fantasia l’été dernier, où il a, en plus de présenter Dharma Guns, participé à une table ronde sur le cinéma de l’extrême, Pop-en-stock est allé à la rencontre du cinéaste. Pour revenir sur ses films, ses thèmes et obsessions, mais également pour discuter des transformations technologiques que connaît actuellement le cinéma.
Il est possible que certaines réponses du maître surprennent. N’oublions pas que, comme George Méliès, F. J. Ossang est avant tout un magicien. De l’image et du son, du récit et du montage. Jamais il ne dévoile ses trucs, préférant plutôt  disparaître dans la fumée.
Dharma Guns (La succession Starkov)
Deux questions d’actualité en guise de commencement. D’abord, un journaliste vous a récemment décrit comme le successeur de Raul Ruiz. Un joli compliment, mais aussi, il me semble, une conclusion hâtive découlant d’une difficulté qu’ont les critiques à situer votre œuvre. Où vous positionnez-vous dans le paysage cinématographique contemporain, plus spécifiquement dans celui du cinéma français?
Raul Ruiz a bien sûr compté parmi les cinéastes du renouvellement pour notre génération au début des années 80 en France et en Europe quand des films comme « L’Hypothèse du tableau Volé » ou « Les 3 Couronnes du Matelot » sont apparus sur l’horizon — revisitant Welles, Cocteau, le film d’aventures ou l’énigme policière pour en exhumer une syntaxe cinématographique propre à son baroquisme… Il a certainement redonné une vitalité à l’attente des films… Quant à me définir précisément dans le cinéma français, c’est difficile… Outre que mes films parlent français, j’ai d’abord été attiré par le cinéma comme langue de Babel!
Voyages dans l’espace, et dans le temps…
Autre manchette marquante, nous assistons actuellement au crépuscule de la pellicule, autant sur le plateau de tournage que dans la salle de projection. Comment l’amoureux du nitrate en vous perçoit-il ce mouvement? Rupture? Finalité? Continuité?
Il est vrai que le cinéma « cinématographique » m’a toujours procuré une excitation quasi-sexuelle – organique… «Le réel qui rêve du réel»…  Le cinéma « virtuel » me semble ontologiquement différent – toute la dimension païenne du cinéma argentique, son culte de la lumière quasi-mazdéen, l’utopie et le prodige du montage d’une réalité en déportation — soudain s’évanouissent, pscchiitt!… Le numérique est d’abord un ‘coup’ techno-économique —  « irrationnel »… Le prix d’un film n’est pas seulement généré par le support de tournage: sans parler du cachet des acteurs, des techniciens, des charges sociales. Il y a tant de frais incompressibles (électricité, machinerie, décoration, post-production)… Le vrai problème risque d’être le démantèlement brutal de l’industrie cinématographique, et la perte de toutes les compétences propres à son premier siècle d’histoire… Mais si le cinéma « ferme », que le whisky est prohibé, il faudra bien passer  au « canada dry » – quitte à le relever d’eau de cologne… Que sera sera…
Avez-vous considéré l’idée de vous tourner vers le numérique?
     
Le statu-quo entre argentique et numérique me semblait prometteur d’un bond en avant – possibilité de mixer différents formats, du 35 mm au Super-8 via la vidéo… L’éradication industrielle de l’argentique me semble une aberration, d’autant que le numérique ne garantit aucune conservation… Mais la video m’a intéressé dés son apparition… Everything is possible ?!
Stanley Kubrick aurait affirmé que le plan d’ouverture d’un film se doit d’être le meilleur. Votre dernier film, Dharma Guns (La succession Starkov), le confirme avec cette incroyable séquence de ski nautique où un furtif plan en couleur laisse place au noir et blanc. Comment avez-vous conceptualisé cette introduction?
Je voulais que la première séquence fasse entrer dans le film comme sous l’effet d’un choc, tout en délivrant déjà certains codes : les cycles de l’eau, la couleur comme illusion vacillante d’une réalité toujours déviée, le voyage «immobile» – le minimalisme de l’image, l’organicité du son… J’ai réalisé cette scène vers la fin du tournage, et ne disposant d’à peine une demie-journée au lieu de deux jours, j’ai tenté d’aller à l’essentiel — la nécessité fait loi, et sens… Le cinéma est aussi une expression hyper-matérialiste…
J’ai l’impression qu’elle synthétise les enjeux du récit à venir tout en se suffisant à elle-même. Il y a après tout une cassure entre cette séquence et le reste du film. Comment s’est opérée cette dualité ?
          
« J’ai vu fermenter les marais énormes, nasses
Où pourrit dans les joncs tout un Léviathan! » (Rimbaud)
À quel moment dans le processus de création avez-vous choisi d’incorporer la pièce « War Pimp Renaissance » de Lard? Elle semble écrite pour votre
J’ai toujours adoré ce titre de Lard. Il figure déjà en ouverture d’un récit publié de 2000 — « Le Ciel Eteint ». Il a toujours été dans mon intention de placer « War Pimp Renaissance » sur la séquence du ski nautique… Il a fallu tourner la scène pour en vérifier l’intuition (!) — comme souvent…
Ce qui me mène au travail référentiel dans vos films. Autant musicalement que cinématographiquement, votre filmographie fourmille en clins d’œil à des artistes, des écrivains, mais aussi des procédés techniques. Cependant, contrairement aux cinéastes post-maniéristes, vous ne leur rendez pas véritablement hommage, les filmant plutôt comme s’il s’agissait des résidus d’une époque dépassée par un chaos ambiant. Pourquoi la mélancolie plutôt que la nostalgie?
Oh, nostalgie du futur, plutôt que mélancolie… Je trouve naturel de convoquer dans mes films ce qui me fait rester en vie, ou concevoir le futur – les Indiens du Mexique savaient que « Ce qui se faisait il y a très longtemps et qui maintenant ne se fait plus, une autre fois se fera une autre fois sera ainsi… Ceux qui vivent aujourd’hui, une autre fois vivront, une autre fois seront.» Part Maudite, plutôt que résidus… Le futur provient toujours de la Dépense… «Trop de bruit dans la tête pour savoir celui qui meurt, celui qui tue» — faisons un film, l’avenir dira…
Le décalage entre soi-même et le monde extérieur est un thème central dans votre filmographie. Ayant vous-même énormément voyagé, à quel point votre propre expérience de l’exploration de pays étrangers s’exprime-t-elle dans votre œuvre?
Le voyage fournit souvent la distraction suffisante pour être soi… Michaux a bien montré comme l’on voyage avec son propre monde… J’aimais dire autrefois : Quand on aime le voyage, on fait des films… J’aime être un étranger quand je tourne un film… N’être rien – pour mieux voir… Pouvoir dire : Je veux le monde, et tel quel! Dénaturer, désocialiser, déterritorialiser…
Vos films semblent signaler l’avènement d’un apocalypse culturel et esthétique. Comment percevez-vous l’avenir ?
Babylone’s burning! Ah, ah, ah…
La solution peut-elle être autre qu’une fuite? Je pense ici à Docteur Chance qui s’échappe par la voie des airs et Starkov qui se réfugie dans la mort.
Cours, cours, Camarade!… Le vieux monde est derrière toi!…
Entretien réalisé sur les sentiers du virtuel le 21 novembre 2011. 
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Tresor des Iles Chiennes – Cine FX

LE TRÉSOR DES ILES CHIENNES (1991) passera  à 20h30 sur la chaîne câblée CINE FX, et vendredi 13 janvier 2012 à 22h 20 !
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Signature FJ Ossang – Paris

Signature FJ Ossang
Les éditions Derrière la salle de bains invitent FJ Ossang à signer ses livres à la librairie Mona Lisait du Faubourg Saint-Antoine, le vendredi 27 janvier à partir de 18h30.
Faubourg St. Antoine
211, rue du Faubourg Saint-Antoine
75011 Paris

Pour fêter la sortie du livre TENEBRES SUR LES PLANETES (5 textes) paru aux Editions MONA LISAIT – collection Books Factory

 

 

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Retro F.J. Ossang – Biarritz, Zinerama 2012 du 18 au 23 janvier

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ZINERAMA 2012
International, festival
Festival
Date de sortie : 18/01/2012 .

SYNOPSIS :
Du mercredi 18 au lundi 23 janvier
Notre Festival annuel pour sa 4ème édition !
Un bouquet de rencontres et des films à découvrir ! 3,50€ la séance !
Les soirées et rencontres :
Mercredi 18 janvier à 20h15 : Avant-première de Howl
Jeudi 19 janvier à 20h30 : Rencontre avec Eric Lange, co-réalisateur du film Le Voyage extraordinaire
Vendredi 20 janvier à 19h15 et 21h30 : Rencontres avec FJ Ossang et Elvire, à 19h15 Docteur Chance, à 21h30 Le trésor des îles chiennes
Samedi 21 janvier à 19h : Rencontre avec FJ Ossang autour de son premier film L’affaire des divisions Morituri
Samedi 21 janvier à 21h10 : Rencontre avec Roland Edzard, réalisateur du film La fin du silence
Dimanche 22 janvier à 17h : Rencontre avec Xavier Denamur, restaurateur et producteur du film La République de la malbouffe
Dimanche 22 janvier à 19h15 et 21h15 : Les médias en question, débat avec Bertrand Cavalier autour des films Epouvantails, autruches et perroquets et Les nouveaux chiens de garde
Lundi 23 janvier à 20h15 : Rencontre avec Stéphane Robelin, réalisateur du film Et si on vivait tous ensemble ? en présence des acteurs : Guy Bedos et Pierre Richard
Et au tarif Zinerama (3,50€), une sélection de films à découvrir :
Hugo Cabret, Le cheval de Turin, Americano, Vivre sa vie, Beauty
COMMENTAIRE :
Americano – jeu 21h30, sam 14h, dim 14h
Beauty – jeu 17h25, dim 21h15, lun 21h10
Docteur Chance – ven 19h15
Epouvantails, autruches – dim 19h15
Et si on vivait tous ensemble – lun 20h15
Howl – mer 20h15
Hugo Cabret – mer 17h55, jeu 14h, ven 21h15, sam 20h45, lun 15h30
La fin du silence – sam 21h10
La république de la malbouffe – dim 17h
L’affaire des divisions Morituri – sam 19h
Le cheval de Turin – mer 20h30, jeu 14h, sam 18h
Le trésor des îles chiennes – ven 21h30
Le Voyage extraordinaire – mer 16h25, ven 20h30, lun 14h
Les nouveaux chiens de garde – mer 14h, ven 19h20, sam 17h, dim 21h15, lun 19h10
Vivre sa vie – jeu 16h30, ven 17h50, dim 19h40, lun 15h50
Cinéma Le Royal, 8, avenue Foch 64200 Biarritz Tel : 05 59 24 45 62 Fax : 05 59 22 33 67 cinema-biarritz@numericable.fr
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FJ Ossang on Tomblands

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lundi 26 décembre 2011

FJ Ossang, Fernando Pessoa et Dom Sebastiao

pessoa froid special matins voyage

En 1999, l’écrivain et cinéaste FJ Ossang a publié le poème de 10 pages, dans le froid spécial des matins de voyage via Pessoa (édité par Derrière la salle de bains). Dans cette errance spatio-temporelle (du Lisbonne du 16è siècle au Londres punk de 1977), Ossang convoque Fernando Pessoa, Christian Rosenkreutz, Victor Chklovski, Stanisław Witkiewicz, Raymond Abellio, Arthur Cravan, Stanislas Rodanski, les Sex Pistols et Dom Sebastiao. Dom Sebastiao, Roi du Portugal et des Algarves de 1557 à 1578, « devenu le Roi caché d’une légende christo-musulmane en matérialisant l’Expansion Mythique des fils de Lusus afin de se dissoudre dans l’universalité et atteindre à la toujours renouvelée création du monde ». La destinée du conquérant Roi Sebastiao, soupçonné de folie, n’est pas sans rappeler celle du conquistador espagnol Lope de Aguirre, mythifié au cinéma en 1972 par Werner Herzog. Dom Sebastiao figure donc logiquement au panthéon de FJ Ossang, aux côtés du Comte de Lautréamont, de Roman Fedorovitch von Ungern-Sternberg ou William Burroughs.

fernando pessoa
Fernando Pessoa, auteur du Banquier anarchiste et du poème « Le Cinquième Empire ».

Voici quelques extraits de dans le froid spécial des matins de voyage via Pessoa.

 

Tombé dans le froid spécial des matins de voyage,
qui ne se demande à quoi bon vivre.
L’aurore est vaine, et le voyage ne conduit nulle part,
si l’on considère qu’à peine sommes-nous débarqués
nous attendons qu’une autre étiole se détache du ciel,
descende sur les épaules, et nous expulse encore dans
Ce froid spécial des matins de voyage.
Fernando Pessoa s’est penché sur la question à tel point
qu’il est aujourd’hui rendu au bout de tous les voyages.
Le voici devenu l’emblème du Cinquième Empire,
le point de ralliement de tous les irréguliers
pour qui Naviguer est plus nécessaire que Vivre –
à supposer qu’il existe des marins convaincus d’arrêter
la tempête en se jetant par dessus bord.

[…]

Maintenant, je me souviens : le train pour Genève via Lyon m’attendait
au petit matin, dans cette gare qu’Abellio a promise à l’accueil
des convois rebelles de la fin des Temps.
L’aurore à Thulé-Matabiau.
C’était à Toulouse, en soixante-seize ou dix-sept, et j’espérais
rencontrer Rodanski à Lyon, dans une des imprévisibles chambres de l’hôpital
psychiatrique Saint-Jean-de-Dieu. Je comptais pousser ensuite
jusqu’à l’eau verte de Genève. (Les Sex Pistols commençaient à être
célèbres.) Masqué sous un pseudonyme digne du Caput Mortuum, John
Lydon proclamait : No Future for you ! Nous sommes le poison dans la machine.
Les fleurs dans la poubelle. L’aventure derrière l’écran.
Arthur Cravan n’était pas si loin, mais le 101’s club n’est pas devenu
le Cabaret Voltaire. 1916-1976, Zurich-Londres aller-retour, Nostalgie
Nostalgie, tu es l’autre nom de la mort.
La veille, c’était un beau soir d’hiver, et j’avais marché dans le crépuscule
des carmins bords de Garonne, avant d’enfiler les petites
ruelles du vieux centre, et de découvrir « Le Retour des Dieux »
de Fernando Pessoa (Manifestes du Modernisme Portugais) à l’étal d’un
libraire affectant les ouvrages de critique sociale.

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bilan cinema 2011 – Slate.fr

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2011, bonne année, mais quelle santé pour le cinéma?

Des beaux et bons films français pour la cuvée qui s’achève, un box-office de feu, et pourtant, la filière technique va mal.

Valérie Donzelli et Jérémie Elkaïm dans «La Guerre est déclarée» de Valérie Donzelli.– Valérie Donzelli et Jérémie Elkaïm dans «La Guerre est déclarée» de Valérie Donzelli. –

Retrouvez tous les articles Cinéma de Slate

Ne commençons pas tout de suite par parler d’argent. 2011 a été une belle et bonne année pour le cinéma, c’est à dire pour la créativité artistique dans ce domaine. Sans trop chercher, j’ai retrouvé 46 titres de films sortis en salle cette année et qui, selon moi, contribuent à cette réussite.

En détaillant cette offre conséquente, plusieurs traits s’imposent. D’abord la petite forme du cinéma américain: deux très beaux films, œuvres majeures de leur auteurs, un de studio, Hugo Cabret de Martin Scorsese, l’autre indépendant, Road to Nowhere de Monte Hellman. Et de belles réussites des frères Coen (True Grit), de Woody Allen (Minuit à Paris) ou Gus van Sant (Restless), mais qui n’ajoutent pas grand chose à la gloire de leurs signataires.

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Hugo Cabret de Martin Scorsese. DR

Mentionnons aussi Meek’s Cutoff de Kelly Richards, cinéaste qui reste prometteuse sans vraiment s’imposer, et c’est tout. Ni côté grand spectacle ni côté expériences les Etats-Unis englués dans les calculs d’apothicaires qui mènent à la reproduction des franchises et maltraitent encore plus les indépendants se sont révélés anormalement peu féconds.

Aucun film important n’a pour l’heure accompagné les printemps arabes, l’Afrique est muette, et si l’Amérique latine ne cesse de monter en puissance, aucun titre ni aucun réalisateur n’a pour l’instant incarné de manière incontestable cette évolution.

Du monde asiatique, on retiendra le beau Detective Dee de Tsui Hark et les réussites signées par les Coréens Hong Sang-soo et Jeon Soo-il, et l’admirable I Wish I Knew de Jia Zhang-ke. C’est terriblement peu.

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Detective Dee de Tsui Hark. DR

Le Moyen-Orient aura été relativement plus prolixe, avec un chef d’œuvre turc, Il était une fois en Anatolie de Nuri Bilge Celan, le passionnant Ceci n’est pas un film des Iraniens Jafar Panahi et Mojtaba Mirtahmasb et Au revoir de leur collègue Mohammad Rassoulof (mais pas le complaisant Une séparation), et la très belle trilogie de Nurith Aviv consacrée à l’hébreu.

Autant dire que c’est l’Europe qui, la chose n’est pas courante, aura dominé les débats. La plupart des grands noms consacrés du continent étaient présents cette année, Moretti (Habemus Papam), Almodovar (La Piel que habito), les frères Dardenne (Le Gamin au vélo), Lars von Trier (Melancholia), Aki Kaurismaki (Le Havre). Chacun de ces ténors du Vieux Continent a présenté un film de très haut niveau, et qui a en outre obtenu un succès.

Sans oublier la merveille signée Manoel de Oliveira (L’Etrange Affaire Angelica), le plus beau film de Wim Wenders depuis longtemps (Pina), deux documentaires mémorables tournés loin de chez eux par le Belge Pierre-Yves Vandeweerd (Territoire perdu) et le Britannique Banksy (Faites le mur). Sans oublier non plus l’envoûtement de Essential Killing de Jerzy Skolimowski, et le véritable événement qu’aura été le succès du Cheval de Turin de Bela Tarr, point d’orgue de la consécration offerte par le Centre Pompidou à son auteur.

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Pina de Wim Wenders. DR.

Il reste le plus massif, l’ensemble des offres de cinéma dues à des réalisateurs français, offre dont la richesse et la diversité ne se démentent pas. Cinq titres s’imposent en priorité, qui n’ont à peu près rien en commun hormis d’avoir marqué l’année (et d’avoir été découverts à Cannes): La Guerre est déclarée de Valérie Donzelli, The Artist de Michel Hazanavicius, Pater d’Alain Cavalier, L’Apollonide de Bertrand Bonello et Hors Satan de Bruno Dumont.

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L’Apollonide de Bertrand Bonello. DR

A peu près rien en commun sinon chez chacun une énorme confiance dans les puissances du cinéma, sa capacité de donner à ressentir et à comprendre. Mais cela sans oublier Mia Hansen-Løve (Un amour de jeunesse), Christophe Honoré (Les Bien-Aimés), André Téchiné (Impardonnables), Céline Sciamma (Tomboy), FJ Ossang (Dharma Guns), Laurent Achard (Dernière Séance), Gerald Hustache-Mathieu (Poupoupidou), ni bien sûr Jean-Marie Straub (O somma luce). Sans laisser de côté le remarquable travail documentaire d’Emmanuelle Demoris (Mafrouza), de Stéphane Georges (Qu’ils reposent en révolte), de Gilles Porte (Dessine-toi), de Régis Sauder (Nous, Princesse de Clèves), de Christian Rouaud (Tous au Larzac).

Et en saluant la découverte de nouveaux venus, Djinn Carrenard avec Donoma, Alix Delaporte avec Angèle et Tony, ou Bruno Rolland avec Léa. Personne ne sera à 100% d’accord avec cette liste-là, peu importe: quiconque a un peu d’intérêt pour le cinéma remplacera tel ou tel titre par un autre (il manque par exemple The Tree of Life, c’est exprès), mais nul doute que la même quantité et la même diversité pourront être au rendez-vous.

Intouchables et les autres

Pas de doute, le triomphe public du film d’Eric Toledano et Olivier Nakache est l’événement «sociétal» de l’année. Avec ses déjà 15 millions d’entrées et la perspective de rivaliser avec les grands champions du box-office (Avatar, Titanic, Bienvenue chez les Ch’tis, La Grande Vadrouille), il symbolise une année qui s’apprête à battre des records de fréquentation. L’aspect le plus intéressant est sans doute que ce succès à un tel niveau d’Intouchables était loin d’être prévisible.

Que son second au classement soit un autre film français, Rien à déclarer, est aussi significatif de la situation générale, loin devant un quatuor de très grosses machines hollywoodiennes qu’on aurait en principe attendu sur les plus hautes marches du podium: Harry Potter n°7b, le Tintin de Spielberg, Pirates des Caraïbes numéro je sais plus combien et Twilight 4.

tintin

Tintin de Steven Spielberg. DR

Globalement, l’année 2011 sera une nouvelle année record pour la fréquentation, qui pourrait dépasser les 210 millions d’entrées, du jamais vu depuis… 1967. Comme il est fréquent, les locomotives du box-office ne sont pas des films très inventifs sur le plan de la forme. Mais si cette tendance a aussi fait les choux gras d’outsiders racoleurs affublés d’oripeaux du film d’auteur (on songe au Discours d’un roi, Black Swan ou à Polisse notamment), elle a également profité à Woody Allen, à Bertrand Bonello, aux Dardenne, à Moretti, à Cavalier, à Kaurismaki, à Bela Tarr, à Lars von Trier, chacun enregistrant un des meilleurs résultats publics de son histoire.

Cette disponibilité au moins d’une partie du public aura consacré la réussite, à leur échelle, de La Guerre est déclarée, de Donoma et de Mafrouza. Et que dire du phénomène The Artist, également plébiscité à l’étranger, ce qui était loin d’être un pari gagné d’avance pour un film muet en noir et blanc?

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The Artist, de Michel Hazanavicius

Le volume de production est lui aussi en hausse, comme celui des financements. On a même vu, pour la première fois depuis la création de ces dispositifs en 1959, l’Etat aller chercher dans les poches du CNC une partie des sommes en principe destinées au soutien du cinéma pour renflouer ses propres caisses.

Quelques bémols majeurs doivent pourtant tempérer cet optimisme. D’abord la quantité n’est pas tout, la masse des films produits et distribués à aussi des effets pervers, poussant hors des écrans des films qui auraient dû y rester, brouillant les repères en défaveur des plus faibles.

Ensuite, l’année a aussi connu quelques catastrophes (Or noir, L’Ordre et la Morale, Le Moine, Forces spéciales) sans oublier le ridicule doublon des Guerre des boutons, aussi mauvais l’un que l’autre. Surtout, elle aura confirmé la tendance lourde d’un cinéma à deux vitesses, où un échec commercial comme Les Lyonnais se goinfre quand même mécaniquement son million d’entrées, vu son système de distribution, tandis qu’un réel succès comme Angèle et Tony peine à dépasser les 200.000 tickets.

Un os dans le champagne

Ces réserves faites, un coup d’œil circulaire sur la situation du cinéma en France (qui n’est pas la même chose que «le cinéma français») aurait dû être l’occasion de toasts et célébrations. Sans être gâchée, la fête aux multiples réussites du secteur est aussi entachée en fin d’année par la situation dramatique des industries techniques, avec la mise en faillite de Quinta Industries, qui fait partie de Quinta Communications, le groupe de Tarak Ben Ammar.

Cette liquidation entraine la disparition d’entreprises historiques comme le laboratoire LTC et le spécialiste d’effets spéciaux Duran, la mise au chômage de centaines de personnes. Elle a failli bloquer la finition d’une soixantaine de films sur lesquels travaillaient ces sociétés, dont la plupart des grosses machines de l’an prochain (Astérix, La Vérité si je mens 3,…), mais aussi par exemple le nouveau film de Leos Carax.

Et même, nouveauté due au passage au numérique, on évoqué le risque que ces films disparaissent corps et bien, si les serveurs numériques sur lesquels ils se trouvent étaient donnés aux créanciers, comme le tribunal en a agité la menace. Les professionnels, à commencer par les producteurs, ont poussé les hauts cris, et les services publics ont mis en place un plan d’urgence.

Mais ces mêmes professionnels, qui traversent une période particulièrement prospère, n’ont pas proposé de payer ce qu’ils devaient aux laboratoires, alors que leurs impayés ont joué un rôle important dans la faillite — on ne parle pas ici d’indépendants en situation précaire mais de Luc Besson, Pathé ou StudioCanal.

L’autre cause de cette crise serait le passage à la projection numérique, non pas en tant que tel mais du fait du rythme et des conditions dans lesquelles a eu lieu ce processus irréversible. Le fait est que ce passage s’est effectué de manière très rapide, 2011 étant l’année où la majorité des projections commerciales sont devenues numériques, changement qui sera terminé au plus tard en 2013. Mais il y a peut-être encore d’autres explications à cette crise.

En effet, à bien y regarder, il ne semble pas que la situation soit si tragique pour Ben Ammar. Celui-ci détenait déjà la quasi-totalité des industries techniques françaises; en 2007 puis en 2009 il avait souhaité fusionner les deux principaux labos, LTC et Eclair (dont il possède 43%). Bercy s’y était opposé, pour cause d’entrave à la concurrence et pour protéger les emplois.

Avec la mise en liquidation de LTC, Eclair se retrouve quasiment en situation de monopole, c’est à dire que l’homme d’affaires tunisien arrive par d’autres moyens à la fusion qu’il avait voulue. Se retrouver avec désormais un seul interlocuteur n’est sans doute pas une bonne nouvelle pour les producteurs, surtout les moins puissants – il reste en fait un autre acteur dans ce jeu, Digimage.

L’Etat français n’est pas blanc-bleu non plus dans cette histoire: au dernier Festival de Cannes, Frédéric Mitterrand et son collègue de l’industrie et de l’économie numérique, Eric Besson, signaient en grande pompe un plan de numérisation du patrimoine financé par le Grand Emprunt, qui devait aussi aider les industries techniques à passer le gué du numérique. Mais depuis il ne s’est rien passé.

Et les films dont s’occupait LTC dans tout ça? Si les titres en cours de finition seront menés à bon port (par Eclair principalement), l’inquiétude demeure sur le sort de milliers de bobines entreposées par les laboratoires, dont une des fonctions consistait à stocker, pour les ayants droits, les copies, souvent les négatifs et autres «éléments de tirage». Une réunion organisée par le CNC aura lieu le 9 janvier à leur sujet.

Jean-Michel Frodon

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Retro FJ Ossang – Montpellier

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Pour sa 10ème édition, le festival « Montpellier à 100% » lance une invitation à expérimenter à 100% sa programmation singulière du 1er au 11 février 2012.

 

 

 

Conférence de presse

Jeudi 5 janvier 2012 à 12h00

à La Fenêtre

27 rue Frédéric Peyson

34000 Montpellier

 

 

INAUGURATION le mercredi 1er février 2012 à 19h

Kawenga, 21 bld Louis Blanc 34000 Montpellier

 

VERNISSAGE le samedi 4 février 2012 à 19h

La Fenêtre, 27 rue Frédéric Peyson 34000 Montpellier

 

 

 

*Avez-vous tout expérimenté à 100% ?

Qu’ils se nomment Brigitte Fontaine, eRikm, F.J. Ossang, Général Alcazar, Gangpol und Mit ou encore Hoquets, qu’ils soient culte ou découverte, ces artistes ont tous en commun leur singularité. Qu’ils soient Belges, Suisses, Asiatiques ou Languedociens, ils font partager au public leur forte personnalité dans des formes toujours réinventées : expositions, concerts, projections. Du neuf donc car l’innovation n’est pas un millésime, mais une ouverture d’esprit.

 

Une programmation artistique exclusive pour des sensations uniques à Montpellier

Particularité du 100%, on n’y joue que du sur mesure, fabriqué à la main par des orfèvres hors pair.

-Installations et performances : eriKm, HeeWon Lee et Starlight 3.4

– Concerts : Brigitte Fontaine, Claudia Triozzi et Haco, Gangpol und Mit, Hoquets, Paamath, Cheveu, Mein Sohn William, Yéti Lane, Le Skeleton Band, Hell’s Kitchen, Général Alcazar

-Clubbing electro : Black Strobe, dDamage et DJ Split et les after de DJ Don Simone, Garfld et Pierre Tomi

-Projections : art vidéo de eRikm, rétrospective F.J. Ossang

-Rencontres : le Bar des Sciences et le Café Babel

 

Un festival social et solidaire

Depuis maintenant dix éditions, le festival se mobilise pour rendre cet événement convivial accessible au plus grand nombre. Gratuité sur les expositions, des tarifs entre 5€ pour les étudiants détenteur du Pass’Culture et 16€ pour le plus cher concert, actions en direction des précaires et des handicapés, médiation pour les scolaires ou les personnes âgées… autant d’actes visant à concilier éthique citoyenne et culture populaire. La qualité pour tous en somme, dans le respect des artistes et des publics.

 

Partenaires

Ville de Montpellier, la Région Languedoc-Roussillon, la Drac Languedoc-Roussillon, l’ARTDA, Réseau en scène Languedoc-Roussillon, le Crous de Montpellier, l’Université Montpellier 2, Alaplatja, Môm’Art Factory, Acfa Multimédia, Kawenga, le CCN, le Rockstore, la Secret Place, La Fenêtre, le Musée Fabre, le cinéma Diagonal, le Théâtre Jean Vilar, le Trioletto, la Maison Pour Tous Voltaire, Victoire 2, le Jam, TV Sud, Let’s Motiv, La Gazette, Radio Nova, Les Inrockuptibles…

Montpellier

www.festival100poour100.com

Organisé par la Méridionale des Spectacles

2012

 

Contacts Presse :

Colibri – Danielle Suon +33 0 650 686 581 / danielle.suon@gmail.com

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ALCHIMIA POST-INDUSTRALE: IL CINEMA DI FJ OSSANG TOMMASO ISABELLA

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ALCHIMIA POST-INDUSTRALE: IL CINEMA DI FJ OSSANGbarTOMMASO ISABELLA

La pellicola, si sa, è materiale infiammabile e si dà ancora il caso che bruci a contatto con corpi incandescenti. E l’astro oscuro e intermittente di F. J. Ossang può illuminarsi solo consumando questo prezioso materiale: una fame di nitrato che può costare cara per chi è costituzionalmente incompatibile con il mainstream. Ma ogni poetica reclama i propri materiali, ogni trasformazione i suoi reagenti, anche a costo di passare anni senza operare, anni di eclisse per un breve momento di irradiazione. Per Ossang questo momento, il “presente assoluto” della ripresa che precipita e fissa il tumulto immaginifico sulla pellicola, conserva un valore rituale: il cinema come moderno paganesimo, “culto del sole e delle tenebre”, dramma originario della luce e dell’ombra che s’imprime sulla membrana sensibile in un grafismo fiammeggiante, che libera scintille di un racconto mitico disperse nella notte della Storia. In questa passione chimica, il cinema rinnova una mistica della materia che lo ricongiunge all’alchimia, che da sempre interessa Ossang: scritture eretiche della realtà, animate da un’immaginazione mutante che traccia nel caos elementare le linee di un’esperienza interiore, cinema e alchimia perseguono la sintesi sublime e scandalosa di “un pensiero che s’incarna”.

Fiero abitatore dell’underground, nel 2010 Ossang è tornato alla ribalta con Dharma Guns (presentato nel 2009 a Venezia Orizzonti), diverse retrospettive in giro per il mondo e l’uscita di questo triplo cofanetto per Potemkine, che raccoglie i tre lungometraggi precedenti e i primi due corti: sostanzialmente, se si escludono l’ultima uscita e tre corti (tra cui lo splendido Silencio, vincitore nel 2007 del prestigioso premio Jean Vigo) tutta la sua opera cinematografica ad oggi. Ossang è una figura extraterritoriale, che scarta le categorie con una vocazione esplosa sui fronti della letteratura, della musica, del cinema, ma concentrata in una sola volontà di poesia. Editore di una rivista d’avanguardia alla fine degli anni settanta, come poeta ha pubblicato una ventina di volumi. Nel 1980 fonda il suo gruppo musicale, i M.K.B. (Messagero Killer Boy) Fraction Provisoire, formazione “noise ‘n’ roll” che combina i mantra elettrificati di Throbbing Gristle e Killing Joke alle litanie dello stesso Ossang. Arrivato a Parigi da Tolosa nei primi anni ottanta si iscrive infine all’IDHEC e s’innamora del cinema. Alla fascinazione per l’età d’oro del cinema muto e per il fermento avanguardistico dei primi decenni del Novecento si sovrappone l’esposizione diretta all’esplosione del punk e al seguente fall-out gotico-industriale per definire un’interzona di contaminazione che Ossang scava secondo itinerari ossessivi, orgogliosamente e testardamente coerenti: da Lautreamont a Debord, da Artaud a Burroughs, emerge tutta una vena nera e rivoltosa che va dal simbolismo al surrealismo, dal situazionismo al punk: una tradizione di sovversione e resistenza poetica che l’autore condensa e declina secondo le proprie necessità. E poi, ovviamente, il cinema: da Murnau a Godard, da Von Sternberg a Welles, l’avanguardia sovietica e quella francese, l’espressionismo tedesco e la serie B americana. Stelle che marchiano a fuoco, “choc mentali” che pulsano come costellazioni: la poetica di Ossang è il deposito di un contagio, le cui variazioni, da un capitolo all’altro della sua rarefatta filmografia, non segnano tanto un’evoluzione, quanto la mutazione di uno stesso ceppo virale. Non si tratta di citazionismo frivolo o nostalgico, Ossang sembra naturalmente portato per quella che Walter Benjamin definiva “l’arte di citare senza virgolette”, sprofonda nel materiale poetico lasciandosene permeare, lo sminuzza, lo ingloba: il suo è un frullatore surriscaldato, ispirato, che restituisce agglomerati affascinanti e complessi, indefinibili per velocità.

Oscillando sempre tra esoterismo intellettuale e gusto dell’epopea, Ossang mette in gioco archetipi e icone popolari (il film d’avventura, la fantascienza, il noir, il road movie) entro una forma narrativa destrutturata, che procede per folgorazioni ed ellissi e, attraverso lo sfaldamento degli scheletri di genere, evoca quadri allegorici e allucinati di un mondo crepuscolare. Benché sia soprattutto l’influsso dell’avanguardia russa e dell’espressionismo tedesco a emergere nel tessuto visivo dei suoi film, Ossang sembra aver ereditato qualcosa anche dall’avanguardia francese: quello che si potrebbe definire un gusto perverso per il feuilleton, condiviso da registi come Abel Gance e Jean Epstein, una predilezione per l’uso di schemi narrativi stereotipici come pretesto per un’orchestrazione visiva; ma anche, sull’antitetico fronte surrealista, la passione estatica e non ortodossa per i meccanismi ingenui e ripetitivi dei cinéroman, professata da Jacques Vaché e André Breton nelle loro scorribande cinematografiche. Jean Epstein diceva che al cinema non ci sono storie, ma situazioni senza testa né coda, e questo sembra essere il presupposto che articola i film di Ossang: situazioni visive, drammi figurali, avventure di una percezione alterata, che non si soffermano sulle parafrasi, ma filano veloci e arroventate, una massa incandescente da cui estrarre gesti e formule che condensano il presente in enigma. Come nei romanzi di Burroughs, il plot è un complotto indecifrabile che non svolge, ma insidia la narrazione, la fa esplodere di continuo in una vertigine plastica. Le sue fila scomposte creano una ragnatela labirintica che tutto avvolge,  che decompone spazi e tempi per rivelare una circolarità infernale. In questo vortice dispersivo dell’azione si agitano personaggi eccessivi e dai nomi altisonanti, scolpiti con tratti eroici ed ancestrali, marchiati da un destino che li costringe bruciare e a consumarsi per illuminare le tenebre che li circondano. Una tensione tra figure e paesaggio che deflagra sempre nel finale, dove i corpi si dissolvono ingoiati dal campo lungo di uno scenario immenso e desolato: il deserto africano virato in un verde acido, in cui il gladiatore Ettore vaga in preda al delirio, la nera plaga vulcanica (memore di Teorema) delle Iles Chiennes, il cielo sterminato del Cile in cui i due amanti in fuga di Docteur Chance si innalzano col loro volo fantasma per perdersi tra le nuvole.

Quello di Ossang è un cinema smisurato, esorbitante, anche confuso e sgangherato se si vuole, ma che conserva sempre una vitalità contagiosa, l’ingenuità e la passione viscerale dell’amateur, di qualcuno che passa da un mezzo espressivo all’altro fedele al proprio istinto e alla propria urgenza espressiva. In questo spazio intermedio, ai margini delle istituzioni e lontano dai loro rituali, Ossang trova la forza per invocare un continuo rinnovamento del cinema, che passa in primo luogo con la messa in gioco di se stesso: per questo si definisce un eterno “debuttante”, che ha fatto solo opere prime, che ogni volta si immerge nella situazione del set, nel rischio e nella chance della ripresa come fosse la prima volta. Così anche i tempi geologici che trascorrono tra un progetto e l’altro diventano paradossalmente una risorsa, perché non sono intervalli morti, ma spazi di triangolazione in cui il poeta, la rock star e il regista che convivono in Ossang si scambiano e accumulano energie da scaricare in una nuova esperienza, che sarà unica, irripetibile e al tempo stesso marcata dalla sua personalissima cifra. Del resto Ossang ammira profondamente Murnau proprio per la sua capacità sublime di “reincarnarsi in ogni suo film”.

I primi due cortometraggi sono abbozzi ancora acerbi di una poetica in definizione: in essi si respira il clima plumbeo del post ‘77, la disillusione e lo sgomento della rivoluzione mancata che torna come revenant spettrale a tormentare l’Europa, il terrorismo di stato e i servizi segreti, il complotto come essenza del potere  e il controllo come sua tecnica. La Dernière énigme (1982), ispirato al trattatello di Edoardo Sanguineti Del terrorismo e dello Stato, è un “film-tract” dagli accenti situazionisti, nel quale emerge già una tensione a trasfigurare la problematicità del presente in una forma mitica (“L’assenza di mito costituisce il mito centrale della nostra epoca” è una citazione da Bataille), a evocare uno scenario definitivo, apocalittico, contro la fuga dalla storia della società occidentale, il suo rifiuto di affrontare il proprio enigma. Zona Inquinata ou La Vie n’est plus qu’une sale histoire de cowboys (1983) trasporta lo stesso umore nero su un piano più esistenziale e personale, delineando i confini del cinema di Ossang come zona di contaminazione e terra di ombre, fantasmi pop sospesi in una notte interminabile, permeata di inquietudini e istinti di morte.

Lo stesso sfondo terminale lo si ritrova nel primo lungometraggio L’Affaire des Divisions Morituri (1984), “peplum futurista” che mette in scena lo sbandamento dei gruppuscoli rivoluzionari tra anni settanta e ottanta, allegoria della lotta armata che s’intrappola nell’arena del potere spettacolare. Orfani di ogni utopia, i neo-gladiatori della Divisione Morituri si fronteggiano fra le rovine della primavera europea: gli arabeschi gotici che nascondono i loro volti e le litanie infernali declamate dal loro leader Ettore (interpretato dallo stesso Ossang) emanano il rifiuto radicale del punk, un’insurrezione primordiale e barbarica nel cuore di tenebra della tecnocrazia. Una rivolta in bilico tra una mascherata circense e un gioco al massacro senza speranza, aizzata dalla stampa e manipolata dalla classe media simpatizzante, simboleggiata dal “bookmaker della morte” Satarenko, che mercifica la rabbia distruttiva dei militanti-morituri. Sullo sfondo rintoccano ossessivi i riferimenti all’affaire Baader-Meinhof e il suo epilogo carcerario nel penitenziario di Stammheim, dove i membri della R.A.F. furono sottoposti ad annichilenti procedure di isolamento e tortura psicologica: il nesso tra “isolamento sociale e privazione sensoriale” emerge come metafora del controllo anestetico operato dal regime spettacolare, a cui il film risponde con la sua messinscena ibrida e sovraeccitata.

Se per Ossang il cinema è sempre “un viaggio nel paese dei morti”, Le Trésor des Iles Chiennes (1990) rappresenta la catabasi suprema, discesa in un oltretomba ribollente di virus e allucinazioni, dove forze arcaiche si sprigionano combinandosi agli effetti catastrofici di una tecnologia fuori controllo. Tutto ha origine dalle nozze alchemiche dello Stelin e dello Skalt, due sostanze in grado di produrre una potente forma di energia, ma la cui sintesi industriale innesca una reazione che rischia di precipitare il mondo nel caos, un’epidemia devastante che le centrali della Kryo Corp. hanno diffuso per tutto il pianeta. L’ingegnere Aldelio, padre della formula, è sparito, tornato nell’arcipelago delle Chiennes da cui la pestilenza ha avuto origine a regnare come un Nosferatu, demiurgo fallito che assiste all’imminente apocalisse. I membri della spedizione della Kryo Corp., arrivati sull’isola finiscono aggrovigliati nelle sue trame, dispersi in un paesaggio preistorico di lava e cenere, assediati dai tam-tam dei cannibali contagiati dal virus che incombono nel fuori campo. Secondo i dettami della tragedia greca o le scaltrezze della serie B, nessun evento ha luogo sullo schermo: i discorsi deliranti dei protagonisti materializzano un orrore che tutto pervade, un mondo sconvolto che sprofonda. Un racconto d’avventura “interiore”, astratto e raggelato, una deriva drogata che si avvolge su se stessa, contrae il tempo e precipita gli eventi verso il punto di fusione: le inquadrature sono infettate da questa atmosfera febbricitante, tese allo spasimo nei contrasti sublimi del bianco e nero, pulsanti tra la dilatazione del formato panoramico e la contrazione dell’iris, il cui uso insistito, insieme alle dissolvenze che inghiottono le immagini, avvolge la visione nel ritmo ipnotico di un incubo tormentato.

Se l’avventura delle Chiennes sprofonda funerea nella bellezza convulsa del suo bianco e nero, Docteur Chance (1997) traccia piuttosto una linea di fuga leggera e nervosa, che attraversa gli immensi orizzonti del Cile e si immerge nelle vibrazioni del colore. L’atmosfera noir e il procedere da road-movie emanano tutta la passione del regista per il cinema americano degli anni ‘40-’50, ma si sente altrettanto chiaramente come Ossang abbia scoperto Howard Hawks e Nicholas Ray attraverso il filtro intellettuale di Godard. Angstel Presley Von Sekt, che sembra un ritratto di Schiele animato da un rush anfetaminico, è uno scrittore frustrato, criminale per passatempo e giocatore per vocazione: tradito dalla sua compagna, rapito dalle grazie venefiche della ballerina Ancetta, mentre il cerchio dei traffici in cui è invischiato gli si stringe attorno, realizza che è arrivato il momento dell’ultima puntata: scomparire. Anche qui un complotto indistricabile, a base di soldi sporchi e quadri falsi, da cui ci si può sbrogliare solo premendo l’acceleratore, filando veloci come proiettili (“On se tire comme des coups de feu”): elegia della fuga e dell’amore di perdizione, con un occhio a Tristano e Isotta e uno a Pierrot le fou, il film è anche una resa dei conti col mondo dell’arte, che assume il tema del falso come quintessenza della mercificazione, e l’ennesima dichiarazione d’amore alla letteratura e alla musica, qui addirittura incarnate in due personaggi-citazione: il poeta-farmacista Georg Trakl e la rock star-aviatore Vince Taylor, interpretato da Joe Strummer. Docteur Chance è forse l’opera più ambiziosa di Ossang, che l’ha definita “un sepolcro per il ventesimo secolo”, una fantasmagoria che accumula ritagli di fumetti pulp, citazioni filosofiche, vinili rock ‘n’ roll, sempre in bilico tra il saggio e la saga.

Romanticismo punk, primitivismo modernista, qualsiasi formula fatica a racchiudere la sintesi alchemica depositata nei film di Ossang. Il suo immaginario è una zona tellurica di collisioni come l’arcipelago vulcanico delle Azzorre, sotto al quale premono le placche continentali di Europa, Africa e America e che Ossang ha scelto due volte come set (Le Trésor des Iles Chiennes e Dharma Guns): stratificazioni che frizionano e sprigionano incandescenze, tempi che entrano in risonanza e aprono punti di fuga rivelatori. Dal manifesto del Futurismo agli Stooges, dalla tabula rasa dadaista al No Future del punk, da Arthur Cravan e Jacques Vaché a Sid Vicious e Ian Curtis: tutti i picchi d’intensità, da un margine all’altro del Novecento, sembrano confluire e sovrapporsi in una fiammata, un montaggio vertiginoso che fa impazzire il tachimetro della Storia. È una questione di velocità: muoversi rapidamente da un’epoca all’altra, scartare la linearità, trovare curvature che facciano esplodere nel presente schegge infuocate dal passato. Ossang fa di questa velocità critica la propria dimensione operativa, consapevolmente innervata nel movimento storico: “Il cinema non è un viaggio fuori dal tempo, ma una dislocazione tra tempo e spazio, che risponde all’accelerazione del tempo nella società”. Potenza di un cinema che fa dell’anacronismo uno strumento di analisi e contestazione del presente: “impossessarsi di un ricordo così come balena in un attimo di pericolo” diceva Benjamin. E il pericolo non è più la catastrofe che incombeva mentre il filosofo scriveva le sue tesi Sul concetto di storia, ma è l’altrettanto catastrofica e illusoria desertificazione della Storia, la notte calata sull’occidente all’inizio degli anni ottanta, proprio mentre Ossang cominciava la sua avventura. “Il cinema è l’ultima chance, l’arte unitaria e collettiva”: una “forza critica” che attraversa, rivisita, sconvolge gli altri mezzi espressivi, ma che è anche in grado di convocarli e mobilitarli: dal montaggio di Ejzenstein al cut-up di Burroughs, dalle figure linguistiche del muto agli impasti rumoristici del post-punk, ogni figura, ogni retorica può essere utilizzata nella guerriglia estetica contro l’omologazione dominante.

Un selvaggio bricolage di tempi ed esperienze che fa di ogni film un composto instabile e potenzialmente esplosivo, dal quale il regista distilla una forma e soprattutto una “forza d’urto”, l’impatto immediato, fisico che il cinema e il rock ‘n’ roll condividono in quanto linguaggi popolari, primitivi e universali. Affascinato dal cinema come “lingua di Babele”, Ossang fa rivivere quell’utopia internazionalista che permeava il cinema degli anni venti e alimentava la fioritura di quel linguaggio possente e silenzioso: si è riappropriato di questa immagine-geroglifico ed è riuscito a farla di nuovo bruciare di bellezza e di storia. Una lingua muta e universale che si confronta con la parola oscura e ritorta della letteratura: Ossang sfrutta la tensione fra parola e immagine, fra cinema e letteratura, lasciando dibattersi i loro corpi senza stringerli in una morsa narrativa. Se l’esuberanza visiva toglie fiato alla parola, questa a sua volta s’incide nel palpitare delle immagini, con le rasoiate silenziose delle didascalie, slogan poetici-politici infusi di una sorta di lettrismo decadentista, o con le declamazioni eccessive e disturbate degli attori: utilizzo armato della parola che accomuna profeti e blasfemi, lingua deterritorializzata che, contro la chiacchiera tautologica del cinema sonoro, recupera il potere rituale e incantatore della parola poetica, una plastica verbale che eccede e rilancia la stilizzazione ribollente delle immagini.

In una breve inquadratura di Docteur Chance s’intravede una frase appuntata sull’occhiello di un volume (le opere complete di Georg Trakl): “Enigma: un oggetto di pensiero che non può essere espresso dalle parole”. È una citazione da un dialogo platonico, ma sembra adatta anche a riassumere il fascino e la sfida del cinema di Ossang: l’oscurità abbagliante di un enigma.

(originariamente pubblicato su Doppiozero)

NOTA

Le dichiarazioni di FJ Ossang sono tratte dalle interviste di Serge Kaganski (« Les Inrockuptibles« , 24 giugno 1998), Nicole Brenez (« La Gazette des scénaristes », n° 15, hiver 2001), e Quentin Mével (« Indipendencia« , 9 marzo 2011).

COFFRET FJ OSSANG (Potemkine)
L’AFFAIRE DES DIVISIONS MORITURI, regia di FJ Ossang, Francia 1984, 81′
LE TRÉSOR DES ILES CHIENNES, regia di FJ Ossang, Francia/Portogallo 1990, 105′
DOCTEUR CHANCE, regia di FJ Ossang, Francia 1997, 96′

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