«
Pour les élections présidentielles, je ne voterai pas. Je renverrai
ma carte d'électeur barrée en rouge avec l'inscription Moulinex. De
toute façon rien ne peut aller comme ça. Après nous, d'autres suivront.
Un jour, ça pétera. Et alors mai 68 ressemblera à une promenade »
Une ouvrière de Moulinex.
ontrairement à ce que l'on pense, le droit de vote n'est pas un acquis
des luttes sociales. Personne n'est mort pour l'obtenir. Le suffrage
universel a été octroyé par ce mauvais exemple de démocrate qu'est
Napoléon III (sauf pour la gente féminine qui l'obtiendra grâce à
De Gaulle lors la 5ème république).
Dès l'origine, « le petit peuple » ne s'est guère soucié
des urnes pour changer sa condition : il y a des traditions qui
ne changent décidément pas !
Alors, si les pleureuses de la gauche éternelle viennent de se réveiller,
ce n'est pas parce que nos conditions de vie se détériorent, mais
parce que la carrière de leur chef vient de connaître un coup d'arrêt
aussi brutal qu'imprévu.
Comme si l'élection de Le Pen le populiste pouvait changer quelque
chose.
Comme si la politique des gouvernements où se trouvent des gens d'extrême-droite
en Europe (Italie, Autriche) avait marqué un changement de politique
sociale par rapport à celle de la droite traditionnelle ou à celle
de la gauche !
Comme si, dans le cadre européen, ces élections avaient une quelconque
importance. Depuis le règne de Mitterrand, les politiciens ont pris
soin de se décharger de tout pouvoir. Chirac en est l'exemple type,
puisque depuis quarante ans qu'on se le traîne, quiconque est bien
incapable de citer la moindre de ses décisions. Le centre de tous
les pouvoirs n'est plus Paris mais Bruxelles. Toutes les décisions
importantes (les retraites, la durée du travail, la sécurité sociale,
les privatisations des énergies, de la santé, de l'école etc.) y sont
prises, en commissions par des technocrates froids et impersonnels,
loin de tout contrôle démocratique.
COMME SI LE PEN POUVAIT ÊTRE ELU ! Possibilité nulle, si
l'on regarde les chiffres (le FN a fait le plein de voix). Doublement
nulle si l'on sait à quel bourrage de crane l'on va être soumis pendant
ces quinze jours par tous les média pour obtenir le Bon Vote ( Il
s'agit d'éviter les erreurs de vote réalisées par le Danemark lors
de la signature du traité de Maastricht —erreur corrigée l'année
suivante par de nouvelles élections ) ou par l'Algérie où les élections
ont purement été annulées « pour sauver la démocratie »
— avec les conséquences que l'on connaît.
Alors, pourquoi l'effroi de ces bonnes âmes citoyennes et républicaines ?
Parce que Le Pen a un électorat majoritairement « populaire ».
C'est l'odeur de frites, d'ail et de sueur qui remonte et irrite les
narines du microcosme politique et journalistique : « mon
dieu, le peuple revient ! » Ces gens n'ont rien compris !
Comme le dit Marx, « quand j'entends le mot peuple, je tremble
pour le prolétariat ». Mais sur ce coup, c'est le prolétariat
qui a marqué un point. Le peuple a voté Le Pen, le prolétariat s'est
abstenu.
Car c'est l'abstention qui a fait le meilleur score (28%, plus les
10 à 20% de gens non inscrits sur les listes (on ne sait), plus tous
ceux dont les droits civiques ont été suspendus). C'est la légitimité
même de ces élections qui est remise en cause, puisque ces politiciens
n'ont été élus qu'avec une infime minorité de voix des gens de ce
pays. Or, ces abstentionnistes sont majoritairement les gueux, les
exclus de ce système (chômeurs, précaires), ceux qui n'ont plus rien
à perdre et rien à gagner (surtout pas des stocks-options).
Mais l'abstentionnisme record n'est pas le seul élément positif de
ces élections, puisque l'on a appris par la même occasion la mort
du Parti Communiste et la disparition prochaine de ces assoiffés de
pouvoir que sont Les Verts.
Certes, on ne peut encore, avec Proudhon, « porter un toast
à la révolution », mais se sont des éléments réconfortants
pour ceux qui souhaitent un changement radical de société. Parce que
depuis 20 ans la gauche a causé une suite de désastres sociaux, que
la droite aurait été bien incapable de porter à terme. Ces désastre
n'ont été possibles que par les illusions dont la gauche était porteuse
(la gauche défend les pauvres !!!).
Nos élites sortent des mêmes moules que sont les grandes écoles de
la république et ne sont portées que par leurs ambitions immenses.
Le terme droite et gauche ne veut plus rien dire parce qu'ils ont
choisi le système politique bipolaire anglo-saxon. Ils ne sont plus
à la tête de l'État pour défendre le bien commun (l'ont-ils
jamais été ?), mais pour assurer le maximum de profit aux privilégiés
et aux multinationales. Le seul pouvoir réel qu'ils gardent est le
pouvoir de répression (armée, police, gendarmerie), afin de maintenir
la paix sociale.
C'est donc une opportunité fantastique qui s'offre à nous de régler
radicalement le problème social en suspens en reléguant aux poubelles
de l'histoire tous les Jean Foutre de politicards véreux qui vivent
depuis si longtemps à nos crochets !
Avec ce printemps radieux, le temps de la grande lessive est venu !
Encore un effort camarades.
Parce qu'entre la peste et le choléra,
L'ABSTENTION EST UN DEVOIR CIVIQUE.
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