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  net- critique

 
  
   

 


 

  

 madre

  Un pour le show.

 
 Frédéric Madre 
 

 
(trois) 28/03/02
    

 

 

   
e dis "… as I am, tonite, a writer I will now talk you through a website". Ça ne fait rire personne, je me concentre un peu plus fort. Je me décrispe. Ça me fait rire moi, alors je continue sur ma lancée et je montre une page sur laquelle on voit Lou Reed en train de faire semblant de se shooter sur scène et sur laquelle on lit "artists, go home" en police courier rouge et trop grosse. En plus petit il y a mon nom et celui de Lester Bangs, l'usurpation me dope moi aussi et me met en condition, et puis ça m'a fait plaisir que Jodi m'aient chambrés sur la police courier un peu plus tôt. Être critique ça n'est que parler de soi et des stars qu'on côtoie, dire ce qu'on déteste le plus fort possible et faire peur. Je parle du top ten comme outil de démonstration de la puissance du critique puis quand on me demandera mes "critères" je jongle avec la street cred. Pas le temps de tout dire.

Richard Meltzer dis "Je choisis d'écrire comme Bo Diddley plutôt qu'écrire sur lui".

Applaudissements.

Maintenant, j'écris ici que je dis que je montre un site web, quelques pages que j'ai préparées spécialement pour cette conférence à amsterdam "internet.kunst en kunst kritiek", où je suis net-critique à force de le dire ici-même et un peu partout. Je paie tribut à mon vieil abonnement à Creem, en résumé. Ça tient à peu de choses, ce qu'on est devenu. Il suffisait de le dire. L'explication produit la destruction du sens.

Musique.

Non, les artistes ne sont pas les bienvenus sur internet. Les artistes devraient s'en rendre compte mais voilà ils ne lisent pas les messages, ils les envoient c'est tout. On les reçoit toujours plusieurs fois, partout identiques. Les artistes sont inscrits à toutes les mailing-lists de la catégorie "culture générale", ensuite ils mettent dans leur CV qu'ils ont participé à une mailing-list célèbre comme par exemple cette engeance de Rhizome, une association d'entrepreneurs "non-profit" qui n'ont pas encore le courage de monter une start-up avec les mails de leurs membres. Les artistes répètent ce qu'ils ont appris c'est à dire comment utiliser toujours plus de surface.
Exposition de groupe, petite surface. Exposition personnelle, grande surface. Musée, surface énorme baies vitrées hauts plafonds formats sur-dimensionnés entrée payante catalogue en couleur cartes postales articles dans le journal. Rétrospective, toute la surface. Le spectateur ne compte pas, ne participe pas, le spectateur consomme.

Lumières.

Ici, ça ne se passe pas comme ça. La surface ne vaut rien, il ne s'agit que d'organiser la fuite de lien en liens en y faisant se transfigurer le sens. Le spectateur ne consomme pas,il fait tout, on le pousse dedans. À tel point qu'il n'existe plus en tant que spectateur mais redevient le centre du spectacle. Internet n'est pas un media de masse, c'est un ensemble totalement incohérent et gigantesque dans lequel seules les micro-structures peuvent survivre.
Je ne suis plus inscrit qu'à des mailing-lists de 15 à 30 personnes qui s'envoient des dizaines de messages par jour. Au bout de 5 jours tout le monde connaît tout le monde personne ne peut plus sérieusement s'engueuler avec qui que ce soit; pendant ce temps sur les autoroutes de l'information les modérateurs (qui se font désormais appeler facilitateurs) censurent parmi les 8 messages reçus par jour de leurs 4500 inscrits, parmi ces 8 messages ils en retiennent 2 ou 3, ceux de leurs amis.

La Rue.

Et puis il y a ceux qui envoient des messages à une liste d'amis, écrite à la main à chaque fois, et ça n'est pas plus mal, le zéro structure. Finalement le résultat est le même, on reste entre amis mais, selon affinités, avec ou sans fascisme ordinaire. On a cru rêver mais c'est fini.

Stars.

Richard Meltzer dis "Maintenant que [Patti Smith] est une star elle ne retourne plus mes coups de fil. Le seul dialogue qu'on ait désormais c'est ce code secret, à chaque fois qu'elle joue sur la côte Ouest, après le premier morceau, je gueule "Brown Sugar" et elle dit "Hi Richard!".

Il est temps de passer aux choses sérieuses.
    

  

madre

 

Frédéric Madre

 
   

  
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