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Joe Strummer - Tenue de route

 
 

Serge Kaganski  et Christian Fevret
Les Inrockuptibles, n° 141 , page 18, 04 mars 1998.

 
   

Strummer et Elvire

Pendant cinq ans, de 77 à 82, Joe Strummer connut la gloire à la tête de The Clash. Un groupe radical et mondialement populaire, moderne et précurseur dans ses métissages : l'une des incarnations du rock les plus galvanisantes, il contribua à changer le cours de son histoire. De cette fournaise intense, Strummer est ressorti carbonisé. Depuis, il n'a plus donné que des nouvelles épisodiques, échos grésillants d'une lointaine station de radio.

Comme s'il avait choisi le silence et la sagesse d'une superstar filante, retournée volontairement à l'anonymat. Rattrapé par son statut d'icône et par le cinéma, on peut aujourd'hui le voir en pilote d'avion fantôme dans le film de F. J. Ossang, Docteur Chance. Joe Strummer s'explique sur son étrange trajectoire.

Bien sûr, parmi les quatre membres de Clash, Topper Headon était un musicien plus accompli, Paul Simonon plus mystérieux et plus sexy, Mick Jones ultracool. D'ailleurs, pour de nombreux fans de Clash, il était de bon ton de préférer Mick comme il fallait choisir Keith chez les Stones : Mick et sa frange brunette, Mick et ses fringues, Mick et ses girlfriends, Mick et ses talents d'arrangeur. Pourtant, c'était quand même bien cette petite teigne de Joe Strummer qu'on préférait en notre for intérieur. Il avait certes les dents pourries et projetait une certaine austérité idéologique, mais quand même : il suffit de revoir quelques extraits du film Rude boy, de se souvenir de leurs concerts guérillas ou tout simplement de réécouter les disques : l'âme de Clash, sa conscience, son moteur à explosion, sa dynamo, son foyer ardent, son sacré coeur, c'était bien Strummer. Lui écrivait les textes, chantait les trois quarts des chansons, tenait la position centrale sur scène. Là, dans le chaudron de l'émeute blanche, on ne regardait que lui, ou quasiment : arc-bouté sur son pied de micro, guitare serrée au poing comme un oriflamme, le corps en transe, la bouille éructante, secouée de spasmes. Découpe mi-Bashung mi-Rotten revisitée Cochran, port altier, col relevé, genou battant la chamade, Joe Strummer était la rage faite homme, toute l'énergie du monde en chair et en nerfs... Un Gavroche punk qui menait son groupe comme on monte aux barricades, le chevalier des hormones adolescentes, le héraut des rébellions fantasmées. Rarement, dans le rock, avait-on vu figure aussi électrocutante. Mais si Strummer était génial, se dégageant absolument de l'ordinaire gueulard du rock, c'est qu'il maîtrisait son abandon, domestiquait ses tripes, canalisait son chaos, ce qui avait pour effet de décupler sa rage viscérale, de la rendre plus efficace encore.

Joe Strummer a carbonisé sa jeunesse. Après l'aveuglante lumière des années Clash, il n'a plus goûté que l'ombre de sa campagne anglaise. Là, il a pu digérer au calme le post-clashum, se refaire une nouvelle cuirasse, commencer une nouvelle vie. C'est un homme tranquille que l'on retrouve des années plus tard, en paix avec lui-même et extrêmement lucide sur son aventure, les traits à peine changés, la silhouette légèrement empâtée. Très content d'avoir été, mais très heureux d'être et ne regrettant rien.

Avec Clash, tu étais l'un des musiciens les plus exposés au monde. Depuis une quinzaine d'années, tu vis dans l'ombre. Comment passe-t-on si brutalement d'une lumière si intense à un retrait quasi total ?

Joe Strummer ­ J'ai pas mal pensé à cette question et j'en suis arrivé à la conclusion suivante : j'ai dit ce que j'avais à dire. J'ai eu ma période, j'ai craché ce que j'avais à cracher. Tout simplement. C'est un processus qui me semble totalement naturel. Quand je bois un coup avec mes amis et que les langues se délient, ils me bassinent régulièrement là-dessus : "Allez, Joe, tu dois revenir, sortir un disque, remonter sur scène, qu'est-ce que tu attends ?" Je réponds toujours très poliment mais souvent, j'ai envie de leur dire "Vos gueules, lâchez-moi avec ça ! Qu'est-ce que vous en savez ? Vous n'êtes pas à ma place." Clash était tellement de son temps, c'était un groupe intimement lié à son époque. Clash n'aurait pas pu exister avant ou après. Une fois notre temps passé, c'était comme se retrouver échoué sur une plage, après le retrait de la vague : vous êtes sur le sable, vidé, lessivé, à sec. Et la mer est loin.

En 88, tu as pourtant sorti un album solo, Earthquake weather.

J'ai essayé de repartir, de trouver de nouveaux musiciens, de reformer un groupe, de tourner de nouveau à travers le monde et tout le toutim. Mais je ne le sentais pas, quelque chose clochait. Lors de cette tournée en Amérique, on avait fait imprimer des T-shirts ­ la quincaillerie habituelle. Et voir "Joe Strummer" imprimé sur les T-shirts me gênait terriblement. C'est une chose de voir un nom de groupe, The Who, The Doors ou The Clash, mais mon propre nom... Ça ne va pas : c'est comme si ton nom devenait une marque de lessive. Ça me mettait mal à l'aise. Et on revient à mon idée initiale : Clash avait eu son temps de parole, nous avions dit ce que nous avions à dire, il fallait savoir se retirer, laisser la place pour les suivants, qui avaient aussi leur mot à dire. Tout le monde ne peut pas être Elton John ou les Rolling Stones, tout le monde ne peut pas continuer ce business éternellement. Il n'y a pas assez de place pour tout le monde de toute façon, il faut bien que certains soient régulièrement lâchés sur le bas-côté. Moi-même, j'ai d'une certaine manière été poussé sur le côté, mais j'y ai volontairement contribué. Depuis Clash, je cherche un but, une direction, un objectif valable... Parfois, je me dis que je vais écrire un bouquin, je ne sais pas... je cherche ce qui serait le plus intéressant, le plus pertinent. En attendant, je survis avec des petits projets modestes : un rôle ici, un peu de musique là, une musique de film, etc. J'ai par exemple accompagné les Pogues en tournée, ce qui m'a occupé deux ou trois ans. Je ne sais pas pourquoi, mais jouer devant des foules immenses, être un rocker célèbre ne me manque pas du tout. Apparemment, ce ne doit pas être une attitude très normale, car mes amis ne me croient pas (rires)...

Généralement, les musiciens dans ton cas reforment leur groupe pour des motifs financiers, ou bien s'accrochent pour des raisons d'ego.

C'est vrai que parfois, l'ego en prend un sale coup : je dois faire face à la vérité et admettre que j'ai sabordé mes chances, que je n'ai pas joué mon coup jusqu'au bout, que je n'ai pas mené Clash de toutes mes forces vers une carrière monumentale. Mais je me tourne vers mes enfants et me demande "Seraient-ils plus fiers de leur père si Clash avait poursuivi ? L'aimeraient-ils plus ?" Franchement, je ne le crois pas. Et puis, ma "carrière" n'est pas encore finie : elle a juste pris d'autres chemins, un autre rythme.

Tu es l'une des très rares rock-stars à avoir délibérément abandonné son statut et ses privilèges.

En gros, je me fais le reproche de ne pas être suffisamment cultivé, de ne pas posséder le savoir et les informations suffisants pour me permettre d'être un porte-parole. C'est très dangereux quand des gens qui ne savent rien parlent tout le temps à voix haute ­ le plus souvent pour proférer des conneries. J'estime ne pas être suffisamment cultivé et informé pour me permettre de faire le tour du monde en braillant "Hey, hey, donnez-moi le micro et écoutez-moi !" Il vaut mieux avoir un bagage conséquent avant d'aller chanter sur le monde qui nous entoure. Je préfère la boucler et occuper mon temps justement à me cultiver, à rattraper un peu ce qui me manque. Ça me rend beaucoup plus heureux. A un moment, j'avais décidé de prendre exemple sur le football. Que fait un footballeur quand sa carrière de joueur est terminée ? Certains deviennent entraîneurs, d'autres managers de club, d'autres commentateurs, etc. Si on applique ce principe en musique, un musicien devient par exemple producteur. Là, je me suis rendu compte que sur le plan de la technologie, j'étais nul. Je pouvais écrire une chanson, gratouiller ma guitare, mais le studio, les micros et tout ça, zéro ! J'ai alors décidé d'apprendre tout ça. Mais comme d'habitude, j'ai fait tout ce qu'il ne fallait pas faire (rires)... Au lieu de prendre des cours, j'ai tout fait tout seul, en autodidacte. J'ai occupé une grande partie de mes dernières années à ça : j'ai travaillé sur un 4-pistes, puis un 8-pistes et maintenant, j'ai un 24-pistes dans ma cave, j'ai pris goût à manipuler toutes ces machines. Le problème, c'est qu'au milieu de cette longue période d'apprentissage, les ordinateurs ont déboulé ! Tout ce que j'ai appris ne sert pratiquement plus à rien. La technologie progresse plus vite que moi. Mais j'ai décidé de continuer avec mes magnétophones, maintenant que je les maîtrise. Et puis, dans un enregistrement, j'aime bien les erreurs, les imperfections. Ce qui m'inquiète avec la technologie digitale, c'est que la musique soit homogénéisée, que tous les disques sonnent pareil, deviennent comme des yaourts au bout d'une chaîne. Que la musique devienne trop parfaite, c'est un risque des nouvelles technologies.

Tu n'a jamais cessé de t'intéresser au rock. N'était-ce pas frustrant, parfois, de ne plus être dedans, de ne pas sortir de disque ? Sans être obligatoirement une star, ne désires-tu pas être un artiste qui travaille régulièrement, tout simplement ?

J'ai fait des choses régulières : un album solo, une tournée avec les Pogues, l'apprentissage de la technologie, mais aussi la musique du film When pigs fly de Sarah Driver, une copine de Jim Jarmusch. Rien que ça m'a occupé une année entière.

Inconsciemment, penses-tu que tu as adopté cette position de retrait pour être en conformité avec une certaine éthique qui était celle de Clash ?

Non... C'était plutôt que je savais ce que valait Clash et... "Si tu ne peux pas faire mieux, alors ne fais rien." Je ne savais pas comment suivre un truc aussi énorme que Clash. Quand j'ai fait mon album solo, je me suis rendu compte que seul, je ne ferais jamais mieux que Clash. J'ai préféré laisser passer du temps, attendre que ma musique évolue car dans la lignée musicale de Clash, je n'avais aucun espace de manoeuvre : on ne pouvait que me comparer défavorablement. Clash était un truc trop définitif, insurpassable. Alors j'attends... j'attends que ma musique évolue, prenne une direction ferme. Le monde est suffisamment lesté d'albums médiocres, sans nécessité. Je préfère être sûr que ma musique arrive à une certaine maturité, qu'elle aille dans une vraie direction, qu'elle ne soit pas un petit caprice de saison. Et jusqu'à présent, je n'en ai jamais été sûr, c'est pourquoi j'ai préféré ne rien sortir. Je ne tiens pas à faire perdre du temps aux gens. En outre, si je fais une tournée et que je vous vends un ticket Joe Strummer, vous voudrez entendre London calling. Et c'est normal. Je suis comme vous : si j'allais voir, par exemple, les Bee Gees, je réclamerais Massachusetts (rires)... Mais je n'ai pas envie de rejouer note pour note London calling. Je suis pris en tenailles. Et là, les ordinateurs reviennent sur le tapis : ils ont changé l'essence de la musique. Il y a des choses fantastiques dans le hip-hop, la techno, etc., et peut-être qu'au lieu de les fuir, je devrais commencer à intégrer les ordinateurs, à m'intéresser aux technologies digitales. En même temps, je garderai toujours une dose de scepticisme vis-à-vis de l'informatique. Quand je vois qu'aujourd'hui, flip flap, on peut faire un disque en quelques minutes... C'est quand même un peu rapide, non ? Mais cet esprit est dans la lignée de l'éthique punk, ça permet d'arracher la musique aux griffes de toutes ces multinationales surpuissantes, de ces studios ultra-équipés et très chers. La house est une des meilleures choses qui soient arrivées à la musique ces derniers temps.

Pourquoi, alors que tu reconnais que faire l'acteur te met mal à l'aise, avoir accepté un rôle dans Docteur Chance ?

J'ai été quasiment obligé de répondre positivement à Ossang parce qu'il n'aurait jamais accepté un "non" de ma part. Je lui ai d'abord dit non, au téléphone. Il m'a alors répondu qu'il viendrait me voir à Londres. Je l'ai supplié "Non, s'il te plaît, ne viens pas !" Finalement, il est venu, nous avons dîné... Il était tellement habité par sa vision, possédé, obsessionnel. C'était impressionnant. Aujourd'hui, ce genre de feu intérieur est rare. Tout le monde est tellement normal, blasé, routinier, dépassionné... Et là, j'avais devant un moi un dingue, mais au meilleur sens du terme : je me devais de lui dire oui, impossible de faire autrement. Je n'avais pas vu ses précédents films, mais il faut reconnaître qu'en Angleterre, rares sont les endroits où l'on montre des films intéressants, différents. Généralement, on ne peut voir que les quelques films hollywoodiens du moment.

Pourquoi cette réticence à accepter ce genre de proposition ?

Je pense que le monde est suffisamment pourvu en daubes. Ma petite part de travail consiste à ne pas rajouter une couche supplémentaire de médiocrité : je ne devrais pas accepter ces petits rôles car je suis un acteur très limité ­ pas plus que je ne devrais sortir un disque moyen... Le monde est déjà tellement encombré de mauvais disques, de mauvais films ou de mauvais bouquins. Il vaut mieux essayer de se concentrer sur un travail solide, de longue haleine. Beaucoup de chanteurs deviennent acteurs : c'est un processus très courant. Mais après Mystery train de Jim Jarmusch, j'ai décidé d'arrêter ces bricolages de dilettante. Ensuite, j'ai rencontré Aki Kaurismäki à Londres : encore un type complètement allumé, extraordinaire. Donc, j'ai fait cette petite apparition dans J'ai engagé un tueur. Mais dans ma tête, c'était "Non, non, non !" Aujourd'hui, je suis heureux d'avoir participé à Docteur Chance : ce film, c'est quelque chose !

Pourquoi penses-tu que des cinéastes veulent Joe Strummer ?

Peut-être qu'ils se rendent compte que j'ai travaillé dans un domaine proche du cinéma indépendant... Et peut-être que mon visage, ma dégaine sont appropriés à leur univers, un univers dérivé du film noir. Et puis ils savent que je ne suis pas cher (rires)...

En toi, ne recherchent-ils pas une icône plutôt qu'un acteur ?

Sans doute. Je suis presque comme un personnage de dessin animé... Je n'ai pas tellement envie de devenir une figure de dessin animé mais, de temps à autre, on ne peut pas éviter de l'être. Cela dit, Ossang possède une vision très ample, un imaginaire beaucoup plus riche que celui d'un dessin animé. J'ai beaucoup appris avec lui. Je ne possède absolument pas son bagage culturel, sa connaissance encyclopédique de la culture européenne. Chaque jour, il me parlait par exemple des poèmes de Georg Trakl, des films de Murnau, des peintures de Kokoschka, etc. Moi je répondais "Hein, mais qui est ce type ?!" Ossang possède cette culture profonde que nous devrions tous posséder... Et en plus, il connaît parfaitement le rock'n'roll. Ce que j'ai appris de plus important, c'est à quel point l'Angleterre a été submergée par la culture américaine depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. L'Amérique nous a envoyé de grands disques et de grands films, mais le déferlement a étouffé la culture anglaise. C'est sans doute à cause de la langue commune, mais en France, les gouvernements ont aussi protégé votre culture, subventionné votre cinéma ; en Angleterre, on a laissé le cinéma agoniser lentement. Je me suis rendu compte à quel point je ne connaissais pas les poètes russes, les cinéastes allemands, les romanciers italiens, tous ces artistes européens géniaux mais oubliés, enterrés par la mégaculture américaine.

Le film mi-fiction mi-documentaire consacré à Clash, Rude boy, t'avait-il déjà donné l'envie de travailler avec l'outil cinéma ?

Oui, mais j'ai vite réglé cette question. J'ai essayé à cette époque, en 79 ou 80, de tourner mon propre film, un muet en 16 mm et en noir et blanc. Et j'ai tout fait de travers ! Je n'avais pas pensé à engager un scénariste, un chef-opérateur, ni à financer quelque peu le projet... J'avais acheté une caméra 16 mm, écrit un embryon de scénario idiot puis j'ai tourné et essayé de le monter moi-même... C'était terrible : ce film était une vraie merde. Une vague histoire de gangsters, très médiocre, et j'avais réussi à entraîner Paul (Simonon), Mick (Jones), nos potes et nos petites amies comme acteurs dans ce mauvais plan (rires)... C'était un gros labo connu qui possédait le négatif. Un jour, dix ou quinze ans plus tard, je les appelle pour prendre des nouvelles, le labo était fermé depuis huit mois ! Je demande ce qu'on a fait de mon négatif ; passé un délai de trois mois après la fermeture, tous les négatifs non réclamés par les ayants droit avaient été détruits ! Mon film était détruit ! Quand j'ai entendu ça... j'étais très heureux et soulagé (rires)... Depuis cette expérience, j'ai compris que le métier de cinéaste n'était pas pour moi.

Avant Clash, quelle était ta situation, ton milieu social ?

J'ai eu une vie étrange. Mon père était orphelin, en Inde. Ses parents représentaient les chemins de fer en Inde et sont morts là-bas. Quand mon père est décédé, j'ai revu un tas de papiers personnels et j'ai découvert qu'il était devenu citoyen britannique seulement deux ans avant ma naissance ­ sans doute à cause de la mort précoce de ses parents. Cette situation de citoyenneté tardive a fait que mon père était encore plus anglais que les Anglais. Après la guerre, il a rejoint le Foreign Office, mais à l'échelon le plus bas. Il a ainsi vécu un peu partout dans le monde. Je suis né à Ankara et, après deux ans en Turquie, nous avons vécu deux ans au Caire, puis deux ans à Mexico, puis à Bonn... Aux alentours de mes 9 ans, mon père nous a envoyés, mon frère et moi, dans une pension en Angleterre. C'était la première fois que je mettais les pieds en Angleterre. Pendant ce temps, mon père fut envoyé en poste à Téhéran pendant cinq ans. C'était dur, parce que le gouvernement ne payait qu'un seul voyage par an : du coup, je ne voyais mes parents qu'une fois par an pendant ces années-là. Tout cela a créé une relation bizarre entre eux et moi. Je n'étais pas très bon à l'école, j'étais du genre à rêvasser en regardant par la fenêtre. Mon père avait étudié durement et était plutôt rigide sur cette question. Il n'avait aucune patience avec moi. Les rares fois où je le voyais, ça ne se passait pas très bien avec mes mauvais carnets de notes. Je m'habituais à ne pas les voir et quand arrivait le moment du voyage, je n'avais pas trop envie d'y aller, c'était bizarre... Je me marrais plus à l'école, avec mes copains.

C'est pendant ces années de pensionnat que tu as découvert le rock'n'roll ?

Oh oui, on était complètement fanatiques ! Je me souviens qu'on se passait vingt fois par jour Trout mask replica de Captain Beefheart. Mon meilleur pote était le futur batteur de 999. On était dingues de musique. Je m'intéressais aussi beaucoup à la peinture. Plus tard, j'ai fait une école d'art, mais je n'étais pas très doué. A cette époque, j'ai commencé à prendre un peu de LSD et du coup, les professeurs d'art m'ont semblé très académiques. Tous les dessins des étudiants me semblaient identiques et moi, je traînais avec la mauvaise bande, ceux qui tripaient au LSD. On a fini par laisser tomber cette école.

Avais-tu un but précis à cette époque, une ambition ?

Ce qui est sûr, c'est que je n'ai jamais pensé une seule seconde à devenir musicien. A l'école, on avait une guitare et on s'y essayait. Cream était un peu le groupe du moment. Les solos de Clapton partaient dans tous les sens. Nous, on essayait de jouer Spoonfull et ça sonnait très basique : doum, dam, doum, dam... Et juste après, on réécoutait la version de Cream et ça faisait whizzzzbloooomzzzzzwooooshshebaaaang ! Evidemment, on se disait "Putain, on n'y arrivera jamais !" Juste après l'école d'art, je suis tombé sur un certain Timon Dogg. Un super musicien qui faisait la manche dans le métro de Londres. Là, ça ressemble à une histoire de blues du Mississippi. Au début, je ramassais la monnaie pour lui, puis il m'a appris quelques accords et je l'ai accompagné à la guitare rythmique... C'est comme ça que j'ai vraiment débuté dans la musique. J'ai même joué des morceaux de Chuck Berry à l'ukulélé ­ l'ukulélé n'a que quatre cordes, c'était donc plus facile à apprendre au début. Avec Timon Dogg, on a même joué dans les rues de Paris. C'était dur, on dormait dans le square du Vert-Galant. Il nous a fallu un mois pour gagner l'argent pour le bateau du retour.

Pendant toute ton adolescence, tu étais livré à toi-même, sans tes parents ?

Oui. Quand ils sont revenus en Angleterre après un dernier poste en Afrique, j'étais le mauvais fils. Notre séparation avait été trop longue. Et puis mon frère s'était suicidé à l'âge de 16 ans. La notion de foyer familial n'avait jamais existé pour moi. Je ne connaissais pas non plus cette notion essentielle qu'est l'appartenance à un quartier. Beaucoup de gamins grandissent dans un quartier, connaissent les voisins, ont des copains de longue date qui grandissent avec eux, etc. Ils ont le sens de la communauté. Quand mes parents sont revenus, ils ont emménagé dans un pavillon à Croydon : pour moi, c'était juste une baraque et une rue parmi d'autres. Je préférais zoner à Londres.

C'est en zonant à Londres que tu t'es retrouvé impliqué dans ce qui allait devenir la scène punk ?

En revenant de Paris, nous avons refait la manche à Londres. Ça devenait de plus en plus dur parce que la police du métro nous emmerdait et nous interdisait de jouer. On était toujours sur le qui-vive, toujours prêts à détaler. Là, je me suis dit que je ferais mieux de monter un groupe.

Comment survivais-tu pendant cette période ?

J'avais quelques petits jobs, mais vraiment les plus pourris qui soient ­ nettoyer les chiottes de l'Opéra national par exemple. Mon pire souvenir de ce boulot, c'est tous les mégots de cigare que l'on retrouvait au fond de l'urinoir. Il y avait un cendrier à droite, un cendrier à gauche de la cuvette, mais non : les mecs balançaient leur putain de cigare dans la cuvette ! C'était pas un problème de ramasser les mégots ; ce qui était insupportable, c'était cette attitude, ce côté "On se croit tout permis parce qu'on est riche et puissant". Et puis j'entendais les cantatrices vocaliser toute la journée : depuis cette époque, je ne supporte pas l'opéra.

Tu vivais au jour le jour ou attendais-tu que quelque chose se passe ?

Pendant cette période de l'Opéra, j'avais un plan : j'avais décidé de monter mon groupe, les 101ers. J'avais juste besoin d'une guitare décente. J'essayais d'économiser, mais avec ces jobs sous-payés, c'était impossible. Finalement, j'ai fait un mariage blanc, ce qui m'a rapporté 100 livres. Avec cet argent, j'ai acheté une Fender Telecaster. Depuis, cette Fender ne m'a plus quitté ­ je jouais encore dessus pas plus tard que la semaine dernière. Avec cette guitare, notre groupe commençait à sonner correctement. Nous bricolions nous-mêmes notre matériel. J'ai construit des bafles avec des tiroirs trouvés dans une décharge. Mon pied de micro, c'était une platine retournée dans laquelle j'avais planté un manche à balai ! Je devais caler le tout avec deux briques. En allant à notre premier concert, j'avais mon manche, ma platine, mes deux briques... Les gens nous regardaient de travers : "Mais qu'est-ce que c'est que ces gugusses ?!" (rires)... J'ai dû emprunter du fric à un gros dealer de drogue, c'était la seule façon d'acheter des amplis. Je peux vous assurer qu'on s'est démerdés pour le rembourser (rires)...

Tu écrivais déjà tes chansons ?

Après avoir acquis la Telecaster, ma première chanson fut Keys to your heart. La première chanson que l'on compose est fondamentale : c'est un immense pas que l'on franchit d'un seul coup. Après, les chansons suivantes viennent plus facilement. Keys to your heart fonctionnait et c'était un grand soulagement, une grande satisfaction. Nous avons loué le premier étage du pub du quartier, nous avons photocopié l'annonce de notre concert et l'avons affichée sur toutes les portes du coin ­ majoritairement des squatts. C'est comme ça que nous avons vraiment appris : en jouant devant un public. Le mercredi, nous connaissions six morceaux ; puis le mercredi suivant, nous en avions rajouté deux ; et le mercredi suivant, nous avions dix morceaux à notre répertoire, etc. Au début, nous avions cinq spectateurs ; un mois plus tard, le pub était archi-plein.

As-tu vécu le mouvement punk à 100 % de l'intérieur, ou avais-tu aussi un certain recul, une distance analytique ?

Il n'y avait rien de plus punk que les 101ers ­ pour être plus précis, nous étions prépunks. Je me souviens d'avoir lu dans le magazine Time Out le mot "punk" pour la première fois à propos d'Eddie & The Hot Rods. Je me suis demandé "Qu'est-ce que ça veut dire ?" La phrase exacte était "Eddie & The Hot Rods est actuellement l'un des meilleurs groupes punks de seconde division à Londres." C'était vers 1975. Un peu plus tard, j'ai vu un groupe qui s'appelait les Sex Pistols. Ils ouvraient pour nous, je les ai rencontrés pendant le soundcheck. Je savais qu'avec les 101ers, nous bossions comme des brutes sans gros résultats : la route, le van, les répètes, Londres-Sheffield, Sheffield-Londres, le van, le squatt et ainsi de suite. On suait sang et eau depuis deux ans et ça ne nous menait nulle part. Quelque chose clochait, mais je ne savais pas quoi. En regardant le concert des Sex Pistols avant nous, j'ai compris que nous étions finis : nous étions un groupe de bar, un pub-rock band, rendu obsolète par une minute de Sex Pistols ! Les autres membres des 101ers n'ont pas compris, ils n'ont pas su, ou pas voulu l'admettre. Moi, j'ai commencé à traîner au 100 Club, là où bourgeonnait la scène punk et j'y ai rencontré les futurs membres du Clash. Mes copains de 101ers détestaient les punks, s'exclamaient dégoûtés "Ils ne savent même pas aligner trois notes" ­ les insultes habituelles. Ils étaient complètement à côté de la plaque.

As-tu tout de suite saisi l'essence du punk ?

Il n'y avait pas besoin de longues analyses. Il était évident que les punks avaient l'énergie, la vérité du moment et que la question de la technique instrumentale était hors jeu. Vous écoutiez les groupes punks et vous pensiez tout de suite "Mais bien sûr ! C'est ça le truc !"

Aujourd'hui, que penses-tu du Joe Strummer de l'époque ?

Je ne pense pas beaucoup à ce genre de question. Parfois, je me dis que Clash a vécu des moments géniaux, comme quand il y avait une émeute dans la salle et que nous persistions à jouer au milieu du chaos. Et parfois, je me dis qu'à certains moments, nous aurions dû faire le contraire... Globalement, je suis très fier de Clash, de nos disques, de ce que nous avons représenté. Nous étions très naïfs sur le plan du business, mais dans le domaine où ça compte vraiment, l'artistique, je ne regrette vraiment rien.

Etais-tu ambitieux, avais-tu la volonté que le Clash marque son époque ?

Souvent, je me pose cette question "Pourquoi voulais-tu devenir célèbre ?" Quand je jouais du rhythm'n'blues avec les 101ers, je me souviens clairement avoir pensé que j'aimerais marcher dans les rues de l'ouest de Londres et que les passants se disent "Hey, c'est le mec du groupe, là." Et quelques années plus tard, pendant la période de Clash, en marchant sur Westbourne Park Road, je me suis dit le contraire : "Pourvu que les gens arrêtent de me regarder et de me casser les couilles" (rires)...

Comment as-tu réagi à l'énorme succès du Clash ?

Lorsque vous y arrivez, vous ne vous en rendez pas compte. Je ne me souviens même pas avoir été choqué par le fait que quelle que soit la ville du monde où on allait, on y était célèbres. Et puis on travaillait tellement dur qu'on ne s'est pas vus au pinacle ­ on n'avait pas le temps. J'aurais aimé prendre ne serait-ce qu'une minute de recul pour regarder ça en observateur, y réfléchir, l'analyser. Mais on n'avait qu'une seule chose en tête : ce qu'on allait faire après, la chanson suivante, le concert suivant... Il n'y avait aucun répit. Le lendemain même de notre retour de la tournée américaine de London calling, on entrait en studio pour enregistrer Sandinista. On y passait nos nuits et nos jours, on n'en sortait jamais.

Comment êtes-vous passé de London's burning à London calling et au patchwork extraordinaire de Sandinista ? D'un groupe punk basique à la richesse musicale de vos derniers albums ?

La première raison, c'est Topper Headon, notre batteur. Topper avait joué dès l'âge de 15 ans avec des groupes de soul noirs américains qui venaient faire la tournée des nightclubs en Angleterre. Avec le punk, la plupart des batteurs n'étaient capables que du strict minimum alors que Topper avait une technique très fine. Ce fut une chance extraordinaire, sans laquelle on n'aurait jamais pu imaginer tenter autant de choses différentes et progresser si vite. La deuxième raison, c'est que nous avions tous nos oreilles grandes ouvertes : on écoutait de la musique en permanence. Et puis Mick Jones était un arrangeur très brillant : il avait le génie pour sentir qui devait jouer quoi et quand. Une grande partie de la qualité de nos disques est due aux arrangements et au sens du son de Mick. Lorsque notre musique s'est ouverte, notamment sur London calling, beaucoup de gens nous ont maudits pour ça. Je me souviens qu'à Helsinki, une bande de skins nazis nous a agressés. L'un d'eux m'a plaqué contre un mur en me serrant le cou... et il pleurait : parce que sa grand-mère aimait ça !!! C'était la trahison ultime. On a connu beaucoup de réactions comme celle-là.

Tu disais que tu ne te sentais pas capable d'être un porte-parole. Que penses-tu aujourd'hui de l'aspect politique de Clash, de vos textes engagés ?

Je crois qu'il y a là un gros problème. C'est compliqué. L'esprit de nos textes était tourné vers un idéal socialiste mais le problème, c'est que l'expérience communiste avait abouti à des Etats policiers, à des dictatures. On n'avait pas de réponse à ça. Nous, nous rêvions d'un marxisme humaniste, d'égalité et de justice sociale. Or, le socialisme réel avait donné Staline ou Mao, des despotes. C'était le vrai problème de nos textes. Si on se pique de chanter des textes politiques, il vaut mieux donner des solutions aux gens. Evidemment, nous étions jeunes, fougueux, nous n'étions pas de grands penseurs... Malgré cela, nous aurions dû proposer des issues à notre public, nos textes auraient dû aboutir quelque part. Quand j'admirais le système social-démocrate en Suède, les Suédois se foutaient de ma gueule en me montrant à quel point leur vie était ennuyeuse. C'était un gros avantage des tournées : on rencontrait beaucoup de gens de tous les pays, de toutes les cultures, on apprenait beaucoup sur le monde. Mais au bout d'un moment, il m'a fallu admettre que je ne savais plus quel était le système politique ou social idéal. Certes, on avait envie de changer le système. Mais pour le remplacer par quoi ? Quand on veut détruire un système, on a intérêt à avoir une solution de rechange qui marche. Au bout du compte, je ne dois pas me voiler la face : c'est peut-être à cause de cette confusion, de cette impasse idéologique que le Clash a fini par exploser. On avait tout dit, on avait craché notre dégoût de ce qui n'allait pas dans notre société, mais on ne pouvait pas aller plus loin, on n'avait pas de solution constructive à proposer. A moins de se répéter éternellement dans le vide, il valait mieux arrêter. C'est peut-être un jugement sévère sur moi et sur le groupe, mais je crois qu'il est lucide.

Malgré ces impasses, ne crois-tu pas que vos textes ont quand même réveillé la jeunesse anglaise et commenté brillamment les années Thatcher ?

Sans doute. Les années Thatcher étaient celles de la rapacité, de l'appât du gain. Le marxisme, l'humanisme étaient des valeurs complètement obsolètes. J'étais complètement perdu dans ce monde tournant autour de la réussite financière. A un moment, je me suis dit qu'il valait mieux que je ferme ma gueule et que je me recroqueville dans ma tanière. Cette question des textes, de la relation à la société, pose celle du rôle de l'artiste. C'est une charge énorme que de proposer des solutions pour que le monde soit meilleur, plus juste, moins violent... Est-ce que cette charge n'est pas trop lourde pour un artiste ? On peut tous décrire une situation ; mais proposer des solutions ? C'est pourquoi je pense que le rôle d'un artiste est de décrire l'époque, de mettre la réalité sous le nez des gens pour qu'ils ne l'oublient pas, de veiller à ce que le public soit toujours en éveil. Mais ce n'est pas à l'artiste de proposer des remèdes aux maux du monde : c'est une tâche trop complexe, trop lourde pour un seul homme.

Malgré tout, ne penses-tu pas que Clash a quand même changé des choses ?

Sûrement, mais je ne sais pas exactement comment, ou à quel degré. Je ne peux que me baser sur les réactions de nos fans. J'ai dû entendre des milliers de gens me dire "Quand j'ai entendu le Clash, ça a changé ma vie." Le groupe a eu un effet sur la vie de certains individus. Maintenant, ce n'est pas pour autant qu'on a changé le monde.

Les Sex Pistols ont changé ta vision de la musique. L'ironie, c'est que Clash est devenu finalement un groupe plus dense, plus riche et sans doute plus important dans l'histoire du rock que les Pistols.

Je ne sais pas si on peut comparer. Les Pistols furent une brève mais brillante explosion et leur impact sur le rock a été énorme. Je pense que leur trace restera indélébile. Dans notre cas, ça s'est passé de façon moins explosive, plus sur la durée, nos textes étaient moins nihilistes, notre musique plus diverse... Les deux resteront dans l'histoire du rock. Clash, ça a été une histoire de chance, un concours de circonstances : au bon endroit au bon moment ! Cela dit, je ne retire rien à nos mérites, on a bossé comme des damnés. Je crois que si un spectateur d'aujourd'hui voyait un concert de Clash à son sommet, il serait tétanisé, électrifié.

Quelles relations as-tu actuellement avec les anciens membres de Clash ?

J'ai perdu contact avec Topper Headon, mais je vois régulièrement Mick et Paul... Tout le monde va bien, nous avons tous fait plein d'enfants.

Que penses-tu de la scène musicale d'aujourd'hui ? Manque-t-elle d'un groupe politisé comme Clash ?

Il y a beaucoup de gens intéressants. Je ne me permettrais pas de critiquer qui que ce soit. Si je débutais aujourd'hui, dans ce monde post-rideau de fer, je ne sais pas si je serais capable d'écrire des chansons politiques. Chez nous, en Angleterre, le parti travailliste est encore plus conservateur que le parti conservateur ! En Amérique, républicains et démocrates, c'est quasiment la même chose. C'est très dur de décrypter le monde politique d'aujourd'hui, de prendre position. Dès qu'un type est élu, quel que soit son parti, il devient complètement imbu de son pouvoir. Blair est pire que Major, parce qu'on croyait en lui. En Angleterre, les gens commencent à dire "Au moins, avec Thatcher, on savait qui on avait en face, il n'y avait pas tromperie sur la marchandise." Pour être élus, les hommes politiques doivent convaincre la masse la plus large possible d'électeurs. Cela signifie que Blair a été élu avec des voix de gens fondamentalement conservateurs. Il est donc obligé de mettre de l'eau dans son vin, de tamiser sa politique pour continuer de plaire au plus grand nombre. Mais les seuls gens heureux de ce processus sont Tony Blair et ses hommes ! Je suis sûr que Churchill, lui, était une vraie personne, qu'il ne parlait pas la langue de bois, que le peuple sentait cette présence humaine. Aujourd'hui, Blair lit un discours écrit et récrit par vingt-cinq conseillers en communication. On a le sentiment que Tony Blair est un hologramme ! Moi, j'aimerais bien voter pour une vraie personne.

A quoi travailles-tu actuellement ?

J'ai vu Docteur Chance au Festival de Londres et je me suis rendu compte que le film ne serait plus jamais montré en Angleterre parce que nous n'avons pas suffisamment de salles d'art et essai. Ça m'a rendu très mélancolique : si notre pays ne peut pas montrer de tels films, ça veut dire que nous nous faisons bouffer, que nous perdons notre culture et notre ouverture culturelle. J'aimerais y remédier, du moins à ma petite échelle. Avec Julian Temple, nous avons décidé d'essayer de fonder The Black Lamp : je ne sais pas si on y arrivera, mais l'idée est de mettre un projecteur et un écran dans un camion, de parcourir le pays pour montrer des films d'auteurs dans ces vieux entrepôts abandonnés comme il en existe partout. Une sorte de cinéma pirate itinérant. Mais je doute qu'on y arrive : il faudrait passer au-delà d'un tas de barrages financiers, juridiques, surmonter des conflits d'intérêt, etc. Mais ça vaut le coup d'essayer. A part ça, je vais faire la musique du prochain film de Julian Temple, ça va m'occuper quelques mois. Sinon, j'ai toutes ces bandes diverses dont je vais essayer de tirer un album, des chansons enregistrées avec des gens comme Horace Andy ou bien le leader de The Grid. Il y a de bonnes choses mais très variées, partant dans tous les styles, et je n'ai pas encore trouvé une direction forte, une cohérence pour les assembler... Il faut que je travaille là-dessus parce que ce serait vraiment dommage de ne jamais les sortir. D'habitude, je ne l'admets pas mais... ça devient parfois très frustrant, tous ces projets qui traînent, qui capotent ou restent en attente : je travaille, je fais de la musique et rien ne sort. J'aimerais le présenter au public.

  

 

   
    

  
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