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« Il y a un consensus entre les grandes sensibilités politiques
du pays qui ont voulu cette monnaie unique. Nous sommes très émus
et assez fiers d’être arrivés à ce résultat. »
Jean-Claude Trichet, France 2, 30 août 2001
Bien
avant que les journalistes n’aient des saillies orgastiques en
décrivant le plan « Vigieuro » destiné à protéger, mitraillette
au poing, le convoyage et le stockage des fonds, la monnaie unique
assurait déjà le bonheur des salles de rédaction. Il y a quatre
ans, le 12 octobre 1997, dans l’émission « Arrêt sur image »,
Christine Ockrent faisait la promotion de son émission de FR3
à la gloire de l’Europe des patrons. Fondamentaliste de la monnaie
unique comme la plupart de ses confrères les plus riches, elle
expliquait à Daniel Schneidermann : « Dans le
cas de la France, la strate médiatique est plutôt anti-européenne… »
Même
très bien disposé à l’égard d’une des meilleures amies de son
patron Jean-Marie Colombani (à l’époque, Le Monde s’apprêtait
à offrir à Christine la direction d’un mensuel de propagande de
l’Europe du capital 1),
Schneidermann ne put réprimer un (petit) hoquet : « Plutôt
indifférente, non ? » Ockrent le reprit aussitôt : « La
tonalité des journalistes qui s’occupent de l’Europe, c’est plutôt
en général négatif, grinçant. En revanche, regardez les sondages,
parlons de l’euro, par exemple. Ce sont des sondages positifs.
Et on constate une chose qui est quand même très intéressante
pour notre pays, c’est que plus les Français sont jeunes et plus
ils croient que l’Europe est pour eux un territoire et un espoir. »
Coup
sur coup, Ockrent venait d’associer à la fois Europe et euro,
Europe et jeunesse, « positif » et soutien à
de nouveaux billets de banque (hideux) conçus par un aréopage
de vieillards réactionnaires. Mieux, elle avait eu le toupet de
prétendre que les journalistes français étaient « anti-européens »
alors que l’Europe qui se construit est destinée à servir leurs
patrons. Cinq ans après le bourrage de crâne médiatique favorable
au traité de Maastricht, l’impudence d’Ockrent rivalisait presque
avec les plus gros mensonges du pitre couineur Mouchard Laurent
Joffrin.
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Les
médias aiment l’euro
L’euro arrose les médias
Si
les médias aiment l’euro, c’est que l’euro va rapporter aux médias.
La firme Publicis, proche du pouvoir « socialiste »
(la richissime jospinienne Élizabeth Badinter en est la plus grosse
actionnaire…), a hérité en France du budget de propagande de la
monnaie unique (525 millions de francs). Le slogan génial qu’elle
a concocté « L’euro, notre monnaie » aura
des destinataires tout trouvés : les périodiques de
Pinault, les radios de Lagardère et les télévisions de Vivendi
qui vont hériter de la pub. L’abonné de PLPL paiera pour
renflouer, par exemple, le quotidien (périclitant) de Ramina [Jean-Marie
Colombani], directeur du quotidien de propagande pro-américaine
Le Monde.
Europédophilie
Le
2 septembre dernier, Le Journal du Dimanche (Matra-Hachette-Lagardère)
dévoilait en avant-première une des grandes idées de la firme
de Badinter : « Sept millions de petits Européens
de 8 à 12 ans [vont recevoir] un poster représentant les
pièces et les billets en euros. Un concours – "Deviens
un champion de l’euro” – sera organisé. Il faudra répondre
à cinq questions. Publicis espère bien que les enfants chercheront
les réponses avec leurs parents. Les vingt-quatre lauréats seront
invités à Francfort pour assister à la naissance solennelle de
l’euro le 1er janvier au matin. Les enfants seront ainsi les premiers
à toucher les billets. Une chance que n’ont pas eue les 900 journalistes
venus jeudi à Francfort pour assister à la présentation des sept
billets par Wim Duisenberg, le président de la BCE. » Mais
l’europédophilie ne date pas d’hier. Il y a deux ans, pour fêter
le passage à la monnaie unique, le gouvernement Jospin avait offert
à chaque bébé français né le 1er janvier 1999 un livret A de la
Caisse d’épargne doté d’une somme de 100 euros (1 euro = 6,55
francs, 1 bébé français = 100 euros). Quelques mois
avant cette grande initiative de la gauche plurielle, Alain Genestar,
devenu depuis directeur de Paris Match (groupe Matra-Hachette-Lagardère),
célèbrait lui aussi « L’aventure qui commence » : « Grâce
à – et pas à cause de – l’euro, les pays vont
perdre une partie de leur souveraineté monétaire ou budgétaire…
À l’heure de la mondialisation, qui est un fait intangible et
non un choix optionnel, les politiques monétaires des pays… sont
déterminées par les marchés. 2 »
Sur Europe 1 (groupe Matra-Hachette-Lagardère), Alain Duhamel
apporta également à l’époque la démonstration de la subtilité
qui le caractérisait et qui, coup sur coup, a envoûté une génération
de directeurs de presse poltrons et sans envergure comme Ramina
et Crassus [Serge July]. Car à entendre Duhamel, les adversaires
(sardoniques) de la monnaie unique étaient des « nostalgiques
de la marine à voile, des gens qui rêvent à un monde dans lequel
on ne peut se diriger qu’en ballon ». (05.01.99) Mais
pour exprimer dans sa pureté de diamant l’euroconsensus des élites
médiatiques, les services de documentation de PLPL ont
exhumé un document unique. Le 10 janvier 1999, lors de l’émission
« Polémiques » de France 2, Michèle Cotta avait réuni
cinq journalistes pour, entre autres choses, parler de l’euro.
La « polémique » promise tardait. Elle fut lancée par
Michèle Cotta avec un : « Au fond, ça c’est
bien passé. Tout le monde est content. C’est votre opinion générale,
consensuelle, ou vous faites quelques bémols ? »
Philippe Reinhard (L’Événement), Jacques Julliard (Le
Nouvel Observateur), Laurent Mouchard (alors à Libération),
Catherine Pégard (Le Point), Patrick Jarreau (Le Monde)
et Paul Guilbert (Le Figaro) devisaient aimablement. Patrick
Jarreau se montrait enthousiasmé par « le moment extraordinaire
qu’on est en train de vivre, la première matérialisation d’un
espace de vie qui s’appelle l’Europe quand même ». Soudain,
imprévu, l’éclat se produit. Philippe Reinhard explose : « Je
suis tout à fait d’accord avec mes confrères, mais j’y apporterai
quand même un petit bémol, qui va dans leur sens, d’ailleurs.
C’est formidable, c’est une aventure extraordinaire. C’est une
aventure extraordinaire, mais elle est surtout saluée par les
Bourses. Il y a une flambée de la Bourse… » Paul Guilbert
lui saute à la gorge : « Voilà un argument communiste !
C’est absurde ! L’aventure est populaire. Si l’euro n’avait
pas été bâti avec l’acquiescement des Bourses depuis un ou deux
ans, depuis Maastricht, il est évident que l’euro aurait capoté ! »
Penaud, Philippe Reinhard s’aplatit : « Ce serait
bien que les autres en profitent également… Rassure toi : je
ne suis pas communiste. »
Fin
de la « polémique » de Polémiques.
Quelques
mois après l’organisation de ce débat impeccablement pluraliste,
Michèle Cotta, qui aura dû toute sa carrière à son abaissement
devant les puissants, était promue directrice de France 2.
1.
Ce mensuel, L’Européen, n’a pas survécu plus de quelques
mois à la démonstration périodique de sa nullité. Le Monde
y engloutit en pure perte la somme de 12 millions de francs. Ce
fut l’un des plus cinglants échecs industriels du duo Raminagrobis
Colombani et du Nabot malfaisant Alain Minc.
2.
Éditorial du Journal du dimanche, 3 mai 1998.
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