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Le
PPA frappé au cœur
Pour
le QVM (Quotidien vespéral des marchés, ex-Le Monde), la
condamnation d’Alain Minc pour plagiat est un camouflet : Minc
préside le « conseil de surveillance » de ce journal.
Or, selon Raminagrobis (Colombani, directeur du QVM) un président
de conseil de surveillance d’un journal a pour rôle de « veiller
au respect de l’indépendance » [voir
encadré p. 2]. Au moment où ce journal entre en Bourse,
l’indépendance du Monde est donc soumise aux caprices d’un
personnage condamné pour « plagiat », « reproduction
servile » et « contrefaçon ».
Les
analyses du conseil scientifique de PLPL sont formelles :
avec ce jugement, c’est l’ensemble du PPA (Parti de la presse et
de l’argent) qui se trouve frappé au cœur. Le Plagiaire Servile
Alain Minc est en effet au centre du dispositif qui soude des hauts
fonctionnaires, les patrons qui plastronnent, les médias qui mentent
et un quarteron d’intellectuels à gages. Lui-même ancien haut fonctionnaire,
ex-industriel, conseiller de grands patrons, responsable de presse
et auteur de deux douzaines d’essais à prétention intellectuelle,
Minc joue le rôle de passeur entre ces divers milieux. « Son
secret, c’est de passer pour un homme de presse auprès des banquiers,
pour un financier auprès des journalistes, pour un écrivain auprès
des industriels. » (Stéphane Marchand, Le Commerce des
illusions, J-C. Lattès, p. 153) Il monnaye aux uns l’aide ou
le contact des autres. Pour mesurer la surface sociale du plagiaire,
il suffit de rappeler la manière dont, en 1999, il a fêté son cinquantième
anniversaire : « Le mercredi 14 avril, il avait réservé
le célèbre restaurant du Palais Royal, “Le grand Véfour”. Et c’est
dans un impressionnant ballet de Safrane, de Mercedes et de BMW
que ses invités sont arrivés. C’était l’événement mondain de l’année.
Minc avait tenu à s’entourer de tous ceux qui comptent à Paris et
qui sont évidemment ses amis : les journalistes Jean-Marie
Colombani, et Franz-Olivier Giesbert, les banquiers Jean Peyrelevade
(PDG du Crédit Lyonnais), David de Rotschild et François Henrot
(Paribas), les industriels François Pinault, Vincent Bolloré et
Pierre Blayau, Jean Drucker et Pierre Bergé, le baron Ernest-Antoine
Seillière. La gauche étant au pouvoir, deux ministres avaient tenu
à souffler en si brillante compagnie les bougies de cet anniversaire :
Martine Aubry et Dominique Strauss-Kahn, accompagné de son épouse
Anne Sinclair. »
(Le Canard enchaîné, 21.04.99)
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DEBATS
A
l’audience du 16 Octobre 2001 tenue publiquement
Patrick
RÖDEL est l’auteur d’un ouvrage intitulé « Spinoza, le masque
de la sagesse », ayant pour sous-titre « Biographie imaginaire »,
qui a été publié en mars 1997 par les Editions CLIMATS.
Alain MINC est l’auteur d’un ouvrage intitulé « Spinoza, un
roman juif » qui a été publié en octobre 1999 par les Editions
GALLIMARD.
Faisant valoir que l’ouvrage « Spinoza, un roman juif »
procède pour une large part du pillage
méthodique de l’ouvrage « Spinoza, le masque de
la sagesse » et insistant sur le mépris
avec lequel les protestations de Patrick RÖDEL auraient été traitées
2, celui-ci et les
Editions CLIMATS ont assigné, par acte du 2 mai 2000, Alain MINC
et la société Editions GALLIMARD en contrefaçon.
[…]
Vu les écritures par lesquelles la société Editions GALLIMARD conclut
[…] que sa responsabilité n’est pas engagée. A titre subsidiaire,
elle demande à être garantie par Alain MINC de toute condamnation.
Elle sollicite la condamnation […] d’Alain MINC à lui payer 20 000
F 3 […].
MOTIFS
Attendu
que les demandeurs […] reprochent à Alain MINC :
-
d’avoir démarqué étroitement la structure de l’ouvrage « Spinoza,
le masque de la sagesse » en effectuant des
emprunts, allant de deux mots à vingt sept lignes, dans l’ordre
chronologique respectif des chapitres des ouvrages,
- d’avoir effectué trente
six emprunts à l’uvre première en ayant recours
à plusieurs types de procédés allant de la reproduction
servile d’expressions au plagiat
de l’économie générale des passages en passant par la
reprise des mêmes citations ou des mêmes anachronismes
; […]
Attendu que, s’agissant des 36
emprunts reprochés, Alain MINC admet dès l’abord, dans
ses conclusions, la réalité de sept d’entre eux (référencés n° 13,
20, 23, 24, 25, 26, 27, 28 dans l’assignation) qu’il
qualifie d’erreurs de sa part 4
;
Que cependant ces emprunts vont, par leur nature et leur importance,
au-delà de la simple réminiscence alléguée, la mauvaise utilisation
des notes prises par Alain MINC ou
son équipe 5
sur l’ouvrage « Spinoza, le masque de la sagesse » n’étant
nullement une cause exonératoire de responsabilité ; […]
Qu’ainsi, nul avant Patrick RÖDEL ne raconte avec les détails et
termes qui lui sont propres, précisément repris par Alain MINC :
- les circonstances du suicide de Uriel da Costa qui se serait,
selon le seul Patrick RÖDEL, pendu avec une « corde de chanvre
qui servait à descendre le seau au fond du puits » après l’avoir
« accrochée à un piton de fer » et avoir « approché
un tabouret » (n° 13 - Patrick RÖDEL p 28, Alain MINC p 67)
6 ; […]
- la lettre de Bouwmeester donnant à Spinoza la recette de la confiture
de roses rouges, cette lettre étant fictive et servilement
reproduite 7
dans l’ouvrage de Alain MINC (n° 29 - Patrick RÖDEL p 84 et 85,
Alain MINC p 124 et 125) ; […]
Attendu que d’autres emprunts établissent encore que le court ouvrage
de 140 pages de Patrick RÖDEL a bien été contrefait
par l’ouvrage de Alain MINC 8
; […]
- la scène de la flagellation de Uriel da Costa retracée de la même
façon avec la reprise des mêmes termes non nécessaires notamment
le « caftan » des notables de l’assistance, vêtement anachronique
pour cette communauté juive de l’Amsterdam du XVIIe siècle 9
[…]
Attendu que les griefs articulés par Patrick RÖDEL étant, comme
il a été vu, partiellement fondés du fait de la reprise d’éléments
protégés, la contrefaçon
est constituée ;
Attendu que la responsabilité
de cette contrefaçon pèse au premier chef sur Alain MINC,
qui en tant qu’auteur de l’ouvrage contrefaisant n’ignorant rien
de l’uvre première et des emprunts indûment faits ne
peut se prévaloir de sa bonne foi 10
[…] ;
Que cette responsabilité pèse également sur la société Editions
GALLIMARD, qui en tant que professionnel averti de l’édition ne
pouvait manquer, sinon de vérifier, du moins de s’inquiéter auprès
de son auteur de l’importance des emprunts faits, sans guillemets,
à la « charmante biographie imaginaire de Spinoza (de) Patrick
Rödel », expressément citée en ces termes par Alain MINC en
page 120 de son ouvrage 11,
et ce, alors même qu’Alain MINC ne se pose nullement en philosophe
spécialiste de Spinoza 12
et que l’essentiel de ce qui est su sur Spinoza l’est par son oeuvre
philosophique ;
Que du fait de cette négligence, la
société Editions GALLIMARD voit sa responsabilité quasi-délictuelle
engagée envers Patrick RÖDEL.
Attendu que Patrick RÖDEL subit en sa qualité d’auteur, du fait
de la contrefaçon
de son oeuvre, un préjudice moral certain qui sera réparé par l’allocation
d’une somme de 100 000 F à titre de dommages et intérêts, le paiement
de cette somme étant mis à la charge des défendeurs, tenus in solidum
;
Attendu que la société Editions GALLIMARD est fondée à invoquer
à l’encontre de Alain MINC la garantie contractuelle dont elle bénéficie
en vertu du contrat d’édition les liant en date du 10 mars 1998 ;
Que Alain MINC sera
condamné à la garantir de toute condamnation.
PAR
CES MOTIFS
Le
tribunal, statuant publiquement, contradictoirement et
en premier ressort, Dit que l’ouvrage « Spinoza, un roman juif »
dont Alain MINC est l’auteur et la société Editions GALLIMARD
l’éditeur est la contrefaçon partielle de l’ouvrage « Spinoza,
le masque de la sagesse » de Patrick RÖDEL, édité par les Editions
CLIMATS,
Condamne
in solidum Alain MINC
et la société Editions GALLIMARD à
payer à Patrick RÖDEL la
somme de 100.000 F (15.244,90 euros) à titre de dommages
et intérêts en réparation de son préjudice moral ;
Ordonne l’exécution provisoire de ce chef ;
Condamne Alain MINC
à garantir la société Editions GALLIMARD des condamnations prononcées
à son encontre 13
;
[…]
Fait à Paris le 28 novembre 2001
Le
Greffier Le
Président
1.
Belle démonstration de la solidarité entre droite et « gauche »
quand il s’agit de défendre le Parti de la Presse et de l’Argent
(PPA) : Kiejman est un ancien sous-ministre socialiste aussi
familier de la cour du roi Mitterrand que Jacques Attali et Laure
Adler. Attali est lui aussi un plagiaire certifié (deux ouvrages
au moins), mais il n’a pas encore été formellement condamné. Christine
Ockrent, propagandiste de Minc, de l’euro et de la police, a également
plagié son dernier livre consacré à la vie amoureuse d’Hillary Clinton.
2.
Dans un article consacré à Alain Minc, qu’il qualifiait de « mouche
dorée », Philippe Lançon écrivait : « Ses
réserves de mépris semblent inépuisables. » (Libération,
27.09.00)
3.
Le jugement dont PLPL publie des extraits va établir que
les éditions Gallimard, déjà déconsidérées moralement par la publication
des petits essais médiocres de Minc, l’ont été professionnellement
en éditant un texte plagié, c’est-à-dire volé à son auteur original.
Gallimard a réagi en se retournant contre Minc qui leur avait présenté
comme original un texte plagié, puis en le chassant comme un malpropre.
Grasset (maison d’édition gangrenée par BHL, ami de Minc) a édité
plusieurs ouvrages du plagiaire à la gloire du capitalisme. Parlant
de BHL, Minc a d’ailleurs expliqué : « Il a été mon
éditeur, il l’est encore. On a presque toujours été d’accord. Un
intellectuel qui ne se trompe guère en trente ans, c’est rare. […]
Il tombe toujours juste parce qu’il a une espèce de boussole morale
qui fait qu’il tombe au bon endroit. » (« Vivement
dimanche », France 2, 11.11.01) Moins de trois mois après la
condamnation de Minc pour plagiat, la maison d’édition Le Seuil,
proche de Nicole Notat, parachevait son avilissement en publiant
un nouvel ouvrage du Plagiaire Servile Alain Minc, Journal de
l’année 2001.
4.
Dans son livre La Mondialisation heureuse (1998), Minc déclarait :
« Je ne supporte plus les approximations intellectuelles… »
PLPL avait soigneusement noté le propos, déjà accablant pour
celui qui, en 1986, prophétisait la « finlandisation »
de la France par l’Union soviétique…
5.
Ici, le tribunal indique que non seulement Minc se rend coupable
de « reproduction servile », mais aussi qu’il a
recours à une « équipe » de collaborateurs, c’est-à-dire
à des « nègres ». Il est vrai que Minc écrit ses livres
« en quelques samedis » (Stéphane Marchand, op.
cit., p. 45). Commentant le harcèlement téléphonique auquel l’avait
soumis le directeur du Monde pour qu’il assure la promotion
du livre plagié de Minc, Jean Daniel, directeur du Nouvel Observateur,
a confirmé la présence de « nègres » aux côtés du plagiaire
servile : « Jean-Marie Colombani me demande encore
de parler du Spinoza de Minc. […] Point d’appareil critique,
ni notes, ni rien de ce genre. […] On m’a dit que de vrais
jeunes philosophes avaient veillé à ce qu’aucune erreur fondamentale
ne fût commise. » (Jean Daniel, Soleil d’hiver,
Grasset, 2000, p. 215-216.)
6.
C’est surtout aux chômeurs et aux Belges que Minc recommande le
suicide. À propos des chômeurs de plus de cinquante ans, Minc a
expliqué : « On peut les oublier. C’est une génération
perdue » *. En 1988, après un raid financier sur la banque
Générale de Belgique, le Plagiaire Servile plastronne. Les pieds
sur la table d’une salle de conférence d’un hôtel de luxe Minc hurle
aux journalistes belges : « Nous sommes là pour des siècles
et des siècles ! »* Quelques jours plus tard, le Plagiaire
Servile est chassé de Belgique…
* Cité par Stéphane Marchand, Le Commerce des illusions,
J-C Lattès, 1999, p. 226 et 167.
7.
Cet attendu du jugement est historique. Il marque un triomphe pour
la Sardonie et pour PLPL : Minc, président du conseil
de surveillance du Monde [QVM] et président de la société
des lecteurs de ce même quotidien pro-américain et pro-Jospin y
est officiellement présenté comme « servile ». C’est donc
un plagiaire servile qui, en ce moment, met sur pied l’entrée en
Bourse du QVM. Minc se vante d’avoir lu Le Monde dès l’âge
de onze ans.
8.
Quand cet ouvrage de Minc est paru, Jean-Marie Colombani, directeur
du Monde, a appelé à deux reprises Jean Daniel, directeur
du Nouvel Observateur, pour lui adjoindre d’en faire personnellement
la critique dans Le Monde. Jean Daniel en a fait le récit
[lire
PLPL, n° 2-3]. Dans l’article de Philippe Lançon
précédemment cité, on lit ce propos d’un éditeur sur Minc :
« Pour avoir les articles importants sur ses livres, il
dressait froidement son plan. Je le regardais, on aurait dit mon
fils devant l’ordinateur. Tout se manipule, il suffit de savoir
cliquer. » « Cliquer » est d’autant plus facile
que « Minc a énormément d’“amis”. Franz-Olivier Giesbert
(qui l’a poussé à écrire sur Spinoza), Jorge Semprun, Pierre Bergé
(qui lui prêta des bureaux chez Saint Laurent), Philippe Labro,
etc. » (Libération, 27.09.00) Quand le livre servilement
plagié par Minc est sorti, un autre « ami » s’est signalé :
BHL. Le 10 novembre 1999, dans Le Figaro (alors dirigé par
Giesbert), BHL a écrit : « Pour ma part, je conseille
la lecture de ce Spinoza à tous ceux qui, à l’intérieur de la culture
juive et au-delà, croient à la fécondité de l’esprit d’hérésie. »
9.
Plagiaire servile, Minc s’est piégé à deux reprises : il réutilise
un terme « anachronique » ; il reprend à son compte
une fausse histoire de confiture de roses rouges inventée par Patrick
Rödel pour piéger les plagiaires. PLPL envisage à son tour
d’utiliser cette technique pour piéger les journalistes qui pilleraient
ses articles sans citer leur source par peur d’être licenciés.
10.
Dans une de ses très nombreuses tribunes parues dans Le Monde,
cet homme que le tribunal vient de reconnaître coupable de mauvaise
foi donnait des leçons d’éthique aux adversaires de la guerre de
Bush en Afghanistan : « La morale n’est pas un ensemble
vide, comme disaient les mathématiciens, et le régime démocratique
lui permet de s’exprimer. » (QVM, 07.11.01) En condamnant
Minc, la justice vient, pour une fois, de permettre à « la
morale de s’exprimer ».
11.
C’est la technique habituelle des plagiaires : ils font une
référence complètement anodine à un livre puis ils en volent allègrement
l’essentiel du contenu. Les auteurs et éditeurs étrangers, qui savent
que le plagiat est une maladie française, ont accueilli avec enthousiasme
le jugement du 28 novembre, infamant pour Minc.
12.
Alain Minc est effectivement davantage connu comme conseiller des
patrons Pinault, Blayau et Bolloré. Ses conseils sont à la fois
très chers (1 million de francs par an par client) et très peu sûrs :
congédié du holding Cerus en avril 1991, Minc a laissé un trou de
2,2 milliards de francs dans la trésorerie. Le magnat italien Carlo
de Benedetti, PDG de l’entreprise ruinée par les conseils de Minc,
a observé : « Je me suis certainement trompé sur Minc
parce que je lui ai confié quelque chose dont il n’était pas capable,
c’est-à-dire la gestion. […] Faire de lui un chef d’entreprise
ou un président-directeur général, c’est comme confier à un sociologue
la gestion d’une charcuterie. » (Carlo de Benedetti
l’Européen, Balland, Paris, 2000, p. 144) C’est en partie
injuste : Minc a réussi en tant que chef d’entreprise dans
le commerce du pruneau qu’il fait cultiver dans sa propriété du
Gers. Minc est un des principaux exportateur français de pruneaux
(Stéphane Marchand, op. cit.).
13.
L’éditeur du livre étant condamné en même temps que le plagiaire
servile, Gallimard a obtenu le feu vert du tribunal pour réclamer
à Minc l’amende de 100 000 francs qu’éditeur et « auteur »
ont été condamnés à payer solidairement.
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