Nous avons vécu dans l'irréalité des mots. Nos idées ont pu exister dans le monde à un moment et aujourd'hui, cet été 2006, on aurait voulu supprimer cette réalité. Vous avez bien entendu. Le président des États-Unis d'Amerique a utilisé le mot "fascist" et il parlait de ses ennemis dans le monde, par extension il parlait de nous aussi. Vous avez bien lu. L'écrivain français de toutes les officialités a invoqué les Républicains espagnols contre, encore ce mot, le "fascisme" des ennemis des alliés du président, celui-là même. Comme le mot Dracula qui dans le lait s'avale d'une bouchée de céréales, lettre après lettre, je peux moi dévorer le mot fascisme qu'on m'inflige dans la soupe du journal. Good thing I had my alphabits! Oh les petits enfants morts eux n'ont pas eu cette chance, ils étaient dans la vie terrible de la guerre et sont morts dans la vie terrible de la guerre, guerre déclenchée par les fascistes se jouant de toutes les pseudo-règles internationales posées par eux-mêmes et qui donc ne s'appliquent pas à eux. L'histoire de France pour les nuls. L'histoire du monde pour les petits hommes, ré-écrite par ceux qui ont le stylo. Si j'ai beaucoup chanté I am a runaway j'ai aussi beaucoup sifflé Brazil, cet été 2006, où les bombes passent à nos oreilles et sous nos yeux. Le terrorisme, contrairement à la prédiction du film, ne se produit pas dans l'indifférence il ne se produit que dans les mots. La peur est instillée par l'annonce de l'événement qui n'a pas eu lieu pendant que l'événement qui a lieu et qui détruit et les vies et l'histoire, lui, serait relégué comme consécutif de cet événement qui n'a pas eu lieu. J'en tremble encore. Good thing I have my alphabits: tout ces mots je vais les manger, lettre après lettre, là ou je suis, dans la gueule du loup.
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