Société |
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Anthropologie
- En vrac |
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L'idée
d'un musée des Arts premiers ou primitifs est fondamentalement raciste. |
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André
Langaney |
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es pleureuses se lamentent que 5 à 51 % des électeurs, selon les lieux, votent pour des racistes xénophobes violant des principes de notre société et la Constitution de ce pays. Peu s'interrogent sur le déficit d'éducation qui a conduit à cette situation dangereuse ou sur ces gouvernements qui ne font pas respecter la loi dans l'espoir de récupérer des brebis électorales égarées. Deux facteurs prédisposent à la xénophobie: la survalorisation de ce que l'on est et l'ignorance de ce que sont les autres. Seule une éducation scientifique, civique et morale, qui ne va pas de soi, peut en venir à bout. La droite fascisante rassemble ici quelques riches trop éduqués dans une culture monolithique, imbue de prétendue supériorité et refusant tout apport extérieur. De l'autre côté sa propagande persuade des exclus, sous-éduqués, du danger fictif que représenteraient les "autres", dissemblables par le physique, la culture, la religion ou le comportement, quand ce n'est pas l'âge ou le sexe. Savoir ce que sont ces autres et comment cohabiter avec eux sont des facteurs incontournables de paix sociale dans des sociétés définitivement mélangées, pour la diversité physique comme pour les origines culturelles. Les immigrés sont là, et plus encore leurs enfants et petits-enfants français, égaux de droits, mais pas de fait. Leur culture est là, avec ses succès mondiaux sur lesquels dansent parfois les auteurs de ratonnades. Mais ces cultures ne sont reconnues ni par l'école, ni par la majorité. A côté de l'histoire, encore enseignée sur un mode ethnocentriste, l'école consacre une place dérisoire au reste du monde et rien aux civilisations de nos ancêtres peu ou pas gaulois. Pourtant, la biologie nous apprend que les différences importantes sont entre individus et non entre races ou nations; l'approche ethnographique, que notre société mondiale est issue d'un mélange de cultures traditionnelles qui ont développé des solutions différentes respectables aux problèmes communs de survie ou de gestion des rapports sociaux. Elles ont aussi produit des traditions compliquées, dont la diversité et la beauté enrichissent ceux qui s'y intéressent. Mais enseigner ce que sont les autres, y compris les autres nous-mêmes, français d'aujourd'hui, n'est pas au programme! C'était bon pour le musée, le musée de l'Homme en l'occurrence. Pourtant, après sa réalisation en 1937 par Paul Rivet, sa tutelle a délaissé ce musée, malgré ses projets de rénovation, jamais financés, son rayonnement scientifique international et le succès d'expositions réalisées avec des moyens dérisoires. Aujourd'hui, un lobby de collectionneurs et antiquaires pousse un Président discrédité à vouloir, par caprice princier, remplacer le musée de l'Homme et le populaire musée de la Marine par un musée d'Art exotique, qualifié scandaleusement de "primitif" ou "premier"! Ce projet raciste et aberrant vient de gens pour qui l'art s'évalue par le prix des "pièces" sur le marché ou par les stars de notre culture qui les ont volés ou possédés. En aucun cas par le projet des artistes ou le sens que leur culture donnait ou donne à leurs oeuvres. Une grande cavalerie administrative détourne des crédits de l'Etat, toujours refusés au musée de l'Homme, vers une association 1901 créée pour le démanteler! Le trésorier des prédateurs est le directeur responsable de l'institution au ministère et le président l'inénarrable Friedmann, assureur racheté avant faillite et conseilleur en dissolution. Cet argent doit servir à payer un collectionneur, auto proclamé conseiller "scientifique", et ses comparses dont le projet est de virer la science du musée. Il paraît qu'éducation et morale sont des priorités du nouveau gouvernement. La première exige de Claude Allègre que le musée de l'Homme et sa mission soient maintenus, recentrés contre les inerties internes, et développés vers leur rôle éducatif prioritaire de formation des enseignants et d'accueil des scolaires. La seconde exige que Catherine Trautmann, cohabitation ou pas, plonge le nez dans le dossier fétide des "Arts premiers", réalise les gaspillages et détournements de fonds publics en cours, et se rende compte de l'aggravation des pillages archéologiques et des vols que cette entreprise scandaleuse a déjà provoqués en Afrique, au seul profit des collectionneurs, trafiquants, antiquaires et spéculateurs. On saura alors si nous tendons vers un redressement politique ou une chiraquie rose.
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