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Imprimez le fichier et adressez la pétition avec les signatures recueillies à J.-M. Colombani
   

 

 

 

 

 

   
À   M. le Directeur du Monde,
M. Colombani,

 
  

(Le Monde, adresse postale : 21 bis, rue Claude-Bernard, 75242 Paris Cedex 05)
    

 
 

Nous, lecteurs du Monde, et par ailleurs écrivains, artistes, critiques, enseignants, étudiants — ou autres —, suite à la mise en demeure adressée à Pierre Jourde par Maître Pierrat, mandaté par Mme Savigneau et M. Douin (Le Monde des livres), tenons à vous faire part de notre vive indignation. Nous ne pouvons croire qu'un journal qui prône la liberté d'expression — proposant, d'ailleurs, une rubrique « Horizons/Débat » (à laquelle certains d'entre nous ont déjà collaboré) — et que quelqu'un qui s'est rendu au procès Houellebecq pour défendre cette liberté (Mme Savigneau) puissent attaquer pour diffamation un écrivain qui n'a fait qu'exercer librement son esprit critique avec les moyens de son art.

Les faits

Sont essentiellement incriminés les passages suivants :

- article de Chronic'art : « Le Monde des livres publie non seulement de nombreux textes dudit Sollers, mais, avec constance, de copieux articles sur son œuvre, généralement remplis de dévotion. L'entité Savigneau dirige Le Monde des livres. Il est donc à supposer qu'elle a quelque  responsabilité dans cette situation. Cette situation est-elle normale et saine ? »

- essai La Littérature sans estomac (L'Esprit des péninsules, 2002) :

Page 41 : « Qui déplaît à Philippe Sollers ou à Josyane Savigneau, quelle que soit la qualité de son œuvre, n'aura pas les honneurs du Monde des livres » ;

Page 42 : « En revanche, dès qu'il s'agit du Grand Libérateur Sollers, aucun encens n'est trop précieux, aucune flagornerie n'est assez appuyée. Les hommages se succèdent dans l'organe officiel du Parti ? Josyane Savigneau se prosterne régulièrement. L'infatigable militante transmet au peuple culturel les intuitions géniales du Grand Libérateur. Les autres membres du Comité central se bousculent pour monter à la tribune » ;

Page 61 : « Quant au Monde des livres, dirigé par Josyane Savigneau, il offre un bon exemple de collaboration avec la « grande tyrannie », pour reprendre l'expression pompière de la même Savigneau. Enfermé dans des questions d'intérêt, de vengeances et de manipulations, claquemuré dans une représentation irréelle du monde, il élabore un modèle de pensée obligatoire et contribue à l'étouffement de talents véritables ».

            Même si les écrits de P. Jourde suscitent chez certains d'entre nous quelques réserves, il nous paraît scandaleux de voir diffamations et injures là où il n'y a que critique de certaines pratiques journalistiques, par ailleurs maintes fois dénoncées (complaisance, renvois d'ascenseur, tactiques diverses...) — critique qui s'appuie sur des procédés satiriques (métaphore, hyperbole,...).

            Cette offensive sur le terrain juridique est d'autant plus surprenante que l'article de M. Douin dans Le Monde des livres est, de ce point de vue, beaucoup plus condamnable : il évoque la « respiration catarrheuse » de l'écrivain et son « manque de rigueur », et cite entre guillemets des termes prétendument extraits du livre, mais qui n'y figurent pas...

Il nous semble donc que la réputation de votre journal aurait à pâtir d'une telle procédure judiciaire, laquelle ne manquerait pas de déclencher de vives actions de protestation à l'échelle nationale.

            En espérant que la raison l'emporte,

Comité national de soutien à Pierre Jourde

   

Quotidienne
L'autre Monde
Par Pierre MARCELLE, Libération, jeudi 21 novembre 2002.

Et voici qu'en matière de France moisie comme dit l'autre, il est bien plus tard encore que nous ne le pensions.
Passe encore que Blandine Kriegel aille flirter à l'Elysée et Antoine Gallimard au rapport Place Beauvau, ce sont affaires de commerçants petit et grand. Mais que Mme Josyane Savigneau, critique littéraire, envoie (1) du papier bleu à Pierre Jourde, écrivain, voilà qui bouscule tous les entendements. C'est arrivé, pourtant, après la publication, dans la livraison de septembre de la revue Chronic'art, d'un papier de Pierre Jourde en lequel celui-ci évoque la façon dont le supplément Livres du Monde (que dirige Savigneau) traita de son ouvrage critique la Littérature sans estomac (2) — charge en règle contre toutes les sortes de connivences qui organisent l'exercice des pouvoirs au sein de la si mal dite « république des lettres » : des apparentements de « Jo.S. » avec l'éditeur Sollers (3) et avec la télé où elle reçoit sans vergogne son patron Edwy Plenel, en passant par de plus discrets exercices de promotion dont le plus spectaculaire restera celui consacré à l'œuvre de Mazarine Pingeot, quiconque bricole dans le milieu sait cela. Sauf, semble-t-il, l'avocat Pierrat, dont il est à craindre que les diverses « mises en demeure » qu'il a envoyées à Jourde et à son éditeur le mettent demain dans la très inconfortable situation de devoir aller au bout de son propos — sauf à se dégonfler. Le risque de ce procès, dont il menace en des termes qui font se tordre de rire tout le mundillo, sera d'y voir traiter d'un magistère, et de mille petits arrangements avec la morale, la déontologie, l'éthique — toutes ces choses qui ronflent si bien dans les très vertueuses proclamations d'intentions et qui sont si allègrement foulées au pied dans leur quotidien exercice. Je crois qu'on va bien se marrer.

(1) Et ce, par l'intermédiaire de son conseil, le bavard Emmanuel Pierrat, qui se pique d'être l'arbitre de toutes les mondanités juridico-éditoriales (en cette matière, il défend tout ce qui bouge). Plus drôle : Me Emmanuel Pierrat a un jour écrit un roman.
(2) Edité à l'Esprit des péninsules.
(3) Et accessoirement éditorialiste copyrighté au Monde.

 

 
         
      

   
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