|
Professeur titulaire de la chaire de sociologie au Collège
de France, il est décédé mercredi à Paris
des suites d'un cancer. Il avait 71 ans. Intellectuel engagé
contre le néo-libéralisme et pour le mouvement social,
il était reconnu dans le monde entier. Très nombreuses
réactions.
Le sociologue Pierre Bourdieu, professeur titulaire de la chaire
de sociologie au Collège de France, est mort des suites d'un
cancer mercredi à 71 ans à l'hôpital Saint-Antoine,
à Paris. Il était une figure internationalement reconnue
de la sociologie contemporaine.
Né le 1er août 1930 à Denguin (Pyrénées
Atlantiques) dans une famille paysanne, Pierre Bourdieu était
devenu agrégé de philosophie en 1954 après des
études au lycée de Pau, au lycée Louis-le-Grand
à Paris puis à l'Ecole normale supérieure en
1951. En 1955, il enseigne au lycée de Moulins. De 1955 et
1958, il est mobilisé en Algérie, qui deviendra le pays
de ses premiers travaux. Il est ensuite assistant à la faculté
d'Alger. A son retour en France, en 1960, il est assistant à
la Sorbonne, puis nommé en 1961 chargé d'enseignement
à la faculté de Lille.
"La
Misère du Monde"
Il est élu directeur d'études à l'Ecole pratique
des hautes études en 1964 et au Collège de France, dans
la chaire de sociologie, en 1981. Il dirigeait également la
revue "Actes de la recherche en sciences sociales" et présidait
le CISIA, le Comité international de soutien aux intellectuels
algériens.
Pierre Bourdieu est l'auteur de nombreux ouvrages, dont "La Misère
du Monde" qui lui avait valu un réel succès public en
1993. Dans ce livre, il s'intéresse aux couches les plus pauvres
de la population en exposant les causes sociales de la souffrance
en France; il dénonce notamment le retrait de l'Etat amorcé
dans les années 70.
Il a aussi écrit "Les Héritiers" (1964, une critique
de l'enseignement supérieur français), "la Distinction"
(1979), "La Noblesse d'Etat" (1989), "Sur la télévision"
(1997) et "La Domination masculine" (1998).
Avec
les sans-papier
Engagé politiquement, vigoureux opposant au néo-libéralisme,
Pierre Bourdieu avait soutenu la candidature de Coluche à la
présidentielle de 1981, les grévistes et les sans-papier
en 1995. Il avait lancé en 1996 une maison d'édition,
"Liber/Raisons d'agir", dans la droite ligne de ses convictions.
En 1998, il publie une tribune dans Le Monde intitulée
"Pour une gauche de gauche", dans laquelle il critique la politique
menée par le gouvernement Jospin. Dans le même temps,
il dénonce "L'Essence du libéralisme", en particulier
dans le domaine de la culture ("La culture est en danger" en 2000).
Il participe aux manifestations contre la mondialisation et apporte
son soutien, entre autres, au pourfendeur de la "malbouffe" José
Bové.
L'an dernier, il avait été l'objet d'un film documentaire
de Pierre Carles auquel il avait donné un titre en forme de
profession de foi : "La sociologie est un sport de combat".
Reconnu internationalement, Pierre Bourdieu était docteur honoris
causa de l'Université Libre de Berlin (1989), membre de l'Academia
Europaea depuis 1993, docteur honoris causa de l'Université
Johann Wolfgang Goethe de Francfort (1996), de l'Université
d'Athènes (1996) et de l'Université de Joensuu (1999).
Il avait reçu la médaille d'or du CNRS en 1993, le Erving
Goffman Prize de l'Université de Californie-Berkeley (1996),
le Ernst-Bloch-Preis de la Ville de Ludwigshafen (1997) et la Huxley
Memorial Medal en 2000.
(N.O.)
|
|