Elles sont 2 sortie
Bruno Richard - Pascal Doury.

 
 
    
 

je vois ma maman toutes les semaines le dimanche le plus souvent. On va au cinéma au restaurant et dans les expositions. Presque toujours on marche pendant une heure ou plus en se racontant nos petites vies. Nous échangeons nos paquets de linge. Moi j'emmène le linge sale et ma maman le linge propre. Il y a souvent du café ou quelque chose à manger dans le paquet que j'emporte. Toujours aussi ma maman me donne 100f. Un après-midi je me promène avec des gens de ma famille et ma maman. Nous somme au jardin des tuileries. Un groupe de 3 personnes avance face à nous. L'une des 3 personnes me fixe étrangement. Tout se passe très vite. Au moment où les deux groupes se croisent ma maman hurle « pascal ton père? ». Il lui dit « mais madame je ne vous connais pas ». Je touche tous les mois 4 000f de salaires tout déduit. Je demande une avance de 1 000 ou 1 500 f. Je dois à ma banque au moins 700 f. Mon loyer est de 1700 f en hiver pendant 4 mois ma note de chauffage est de 500 f. Tous les 2 mois 250f de téléphone. Au maximum il me reste 1 300 f. Mes achats les plus réguliers sont des 45 tours des livres et du matériel pour travailler soit 600 f. La nourriture et la poudre sont les 2 choses pour lesquelles je dépense l'argent du mois à venir. Je touche 10 000 f par mois. J'ai un loyer de 1 400 f par mois. Je sors 3000 f par mois. Je mange au restaurant tous les midis. Je paye par chèque. Tous les mois mon compte s'accroit de 3 000 f sauf quand je voyage. Je suis toujours pas « installé » dans mon 2 pièces. J'achète pas de machine à laver car elle rentrerait pas dans ma salle de bain, alors que je pourrais me l'acheter. Le samedi j'achète toute la nourriture pour le soir à monoprix. Ca me fait perdre plein de temps. J'avance des sous à mon copain. J'achète pas de drogue ni d'alcool seulement des bières pour 2 de mes copains. Ma banque voulait absolument que je prenne un compte d'épargne logement j'ai pris le minimum. Quand j'aurai encore plus de fric — car ce salaire est assez récent — j'achèterai aussi un billet-open un an pour faire le tour du monde. Plein de gens trouvent cette situation financière insupportable. J'espère que je me payerai jamais une bonne. « Mes chefs » disent que je suis sous-payé et m'augmentent sans que je leur demande. Je vais peut-être virer mon bidet et quand même m'acheter une machine à laver.

    



 

— publié une première fois dans le MHM-papier, n°0, avril 1994, page 3 —

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