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XIV
Bloc, bloc et bloc ! Bloc fait de fissures demeure debout par les fissures. Allons, il faut continuer. Continuons. Occupons chaque crevasse, chaque interstice, et si vous voyez des taches, regardez les mouches. L’approche de l’orage verdit la cour de jaune à trois heures. Le premier, le premier baiser, il faut le réserver à la gueule qui lâche nos plus infidèles saletés, éclosion, chauve-souris, soldes, songes fragiles… Les fesses souriantes, blondes de promesses… La parôle. Une source jaillit si on lui en accorde le droit. Elle fuit les vergetures. Souvenez-vous : on a volé ses plans, dévoilé ses secrets, on a fait courir les rumeurs, agité la menace du frein, à dessein. Terrible désarroi, allant, revenant, qui nous désarme. Le fredon, contre, pour conjurer, pour consoler : Toi et moi/On se noie/Nous et vous/On s’échoue. Le temps en cette chambre, poussière à disperser du souffle. Inutile de scruter le ciel : il est blanc. Et les étoiles, invisibles, ne sont pas noires. Le ciel est blanc : à nous de le remplir ! Le galop trépigne ! Je veux un souffle comme un fleuve, majestueux et dodu oui je veux bien oui, qui charrie les mues du lavis, une coulée de boue à pépites, une cascade à crottes dorées. Griffer la tôle jusqu’à la crever. Je verrais mieux mon visage à la lumière du four solaire. Le pont se dresserait à l’orée du vallon. L’herbe serait à caresser. L’éclipse totale ; réunis. Susciter le préverdissement. Gueuse la structure… Le souffle est trop court, j’étouffe, l’expérience avorte, les terres ne changent pas, l’orage n’est jamais suffisant. La vie aux orties… Les croix aux champs… Je supporte mon propre cadavre, mon propre dada à monter. Nous respirons la cendre de la chambre. Nous attendons quelque chose qui n’arrive pas. Nous ne pouvons nous mouvoir. Nos présences sont enfermées. Nous connaissons nos limites et nous voulons les rompre, rejoindre la longue vie des modèles… Le rayon viride expire. Nous devenons les témoins de l’érosion. Nous habitons la chambre du Temps. Nous sombrons. Les sanglots me corsettent tandis que vous dormez à mes côtés ; tant de honte à cacher. La honte d’être, simplement, vivante, tremblée, amenée à hanter un vide. Qui vous dit que je ne souhaitais pas rester néant, ne pas advenir ici ? Finalement, ai-je mérité de ne pas être autre chose que ce que je suis, une force vivante à la recherche d’un équilibre ? Là-bas, au jardin, il y a toujours un danger, une épiphanie : cette femme que je ne suis pas encore. La mère en jachère. Les dessous prestigieux, tape-à-l’œil, coquille vidée. L’amie-miracle – gueule à bisous – l’attendue éloignée. Comme un halo, flouté à point, nimbant la tête, cérémonieusement : la sainte pondeuse. Pâle. Une lune gibbeuse, une feuille de rhubarbe, deux comètes. Atteindre le corps des adieux. Wagon solitaire, un cœur tremblait sous la mare de fumier, soulevant le masque. Tu t’éteins, subitement, tu t’éteins à l’entrée du jeu, alors que j’attendais de toi un peu plus de force. Tu renonces, purement et simplement, tu m’obliges à dominer ta faiblesse, tu m’accules à toujours te ressusciter. Fuyante en jambes, fuyante, formidable dans l’oubli de ta personne, tu m’appelles avant de disparaître, toujours plus lointaine, toujours plus perdue… Et je te regarde, cette fois encore, je te regarde t’éteindre… Femme je suis povrette et ancienne/Qui rien ne scay, oncques lettre ne luz… Pourquoi continuer ? Pourquoi ? Parce que ça parle de notre survie.
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