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XIX
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Les
chiens sont avec les loups.
La
paix avec les pléonasmes.
Tout
est calme.
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Guy
Ferdinande
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Lorsque
j’ouvris les yeux, le paysage avait recouvert un épais patchwork
de toile, de tissu et de plastique. Tentes, vêtements, ordures s’entremêlaient
en un monstre synthétique privé de tout organe vital. Les
âmes et leurs réceptacles de chair avaient été
soulevées et envoyées vers un nouvel habitacle.
Seul,
face au champ vide de la vision. Seul, parmi les aiguilles fichées
dans la terre, écorché par les fibres difformes, luisantes,
le soleil peinait à me guider. La forêt, réseau de
filaments enchevêtrés, branches, membres noircis, givre,
feuilles pourrissant sous les aisselles, la forêt, empreintes de
chenilles, morsures, grincements, les muscles se dilatent, collent aux
vêtements, poisse, râles, tympans entaillés, gants
sans mains, mains sans doigts, détrempée, la forêt,
racines fétides, ravagée, scories vivaces, ne tremblait
plus. La forêt n’existait plus.
Sans
peine, je m’aperçus de ma brusque présence. Je retins les
mouvements de ma respiration, ces accrocs imprévus, imprévisibles.
Je me dirigeai vers le fleuve. Pâle, assailli d’échos montant
de tous les horizons, j’avançai vers la berge, biffé, raturé,
paré à jouir de mon innocence retrouvée.
Né
blanc, le jour bleuit, puis jaunit, se fanant. Le jour n’est pas l’histoire
du jour. Le jour n’endosse pas la géographie du jour. Ma vie est
moins vivante que je ne le suis, libre.
Ce
qui compte, désormais, ce que la fêlure laisse entrevoir.
La
pirogue sera mon berceau. Les ruines seront sidérales, indélébiles,
indésirables tâches de mémoire. Les fractures seront
autant d’alliances. Les pluies laveront les noyés. Les mouchoirs
pleureront d’allégresse. Les pères ne songeront plus à
nous expliquer leur détresse. Les slogans dépériront
de désespoir. Les sentences déformeront les pages. Les retrouvailles
renverseront les prophéties. Les descendants des mages demeureront
introuvables.
Maintenant,
je suis ouvert à toutes les paroles.
Je
m’éloigne de la rive. Des étiquettes flottent à la
surface de l’eau.
Peu
importe de n’être pas lu aujourd’hui. L’attraction viendra de cette
rencontre future. Le mot de la fin n’est pas pour moi, ni pour personne.
Le
mot
de
la
fin
est
une
feinte
XX @ index
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