lundi 26 décembre 2011
FJ Ossang, Fernando Pessoa et Dom Sebastiao
Voici quelques extraits de dans le froid spécial des matins de voyage via Pessoa.
Tombé dans le froid spécial des matins de voyage,
qui ne se demande à quoi bon vivre.
L’aurore est vaine, et le voyage ne conduit nulle part,
si l’on considère qu’à peine sommes-nous débarqués
nous attendons qu’une autre étiole se détache du ciel,
descende sur les épaules, et nous expulse encore dans
Ce froid spécial des matins de voyage.
Fernando Pessoa s’est penché sur la question à tel point
qu’il est aujourd’hui rendu au bout de tous les voyages.
Le voici devenu l’emblème du Cinquième Empire,
le point de ralliement de tous les irréguliers
pour qui Naviguer est plus nécessaire que Vivre –
à supposer qu’il existe des marins convaincus d’arrêter
la tempête en se jetant par dessus bord.[…]
Maintenant, je me souviens : le train pour Genève via Lyon m’attendait
au petit matin, dans cette gare qu’Abellio a promise à l’accueil
des convois rebelles de la fin des Temps.
L’aurore à Thulé-Matabiau.
C’était à Toulouse, en soixante-seize ou dix-sept, et j’espérais
rencontrer Rodanski à Lyon, dans une des imprévisibles chambres de l’hôpital
psychiatrique Saint-Jean-de-Dieu. Je comptais pousser ensuite
jusqu’à l’eau verte de Genève. (Les Sex Pistols commençaient à être
célèbres.) Masqué sous un pseudonyme digne du Caput Mortuum, John
Lydon proclamait : No Future for you ! Nous sommes le poison dans la machine.
Les fleurs dans la poubelle. L’aventure derrière l’écran.
Arthur Cravan n’était pas si loin, mais le 101’s club n’est pas devenu
le Cabaret Voltaire. 1916-1976, Zurich-Londres aller-retour, Nostalgie
Nostalgie, tu es l’autre nom de la mort.
La veille, c’était un beau soir d’hiver, et j’avais marché dans le crépuscule
des carmins bords de Garonne, avant d’enfiler les petites
ruelles du vieux centre, et de découvrir « Le Retour des Dieux »
de Fernando Pessoa (Manifestes du Modernisme Portugais) à l’étal d’un
libraire affectant les ouvrages de critique sociale.