n prélat de l'Église catholique romaine, dans la ville qui
compte la plus forte densité de vieillards idiots et de crottes de chien au mètre
carré, a cru devoir exprimer sa vertueuse indignation. La civilisation chrétienne et
occidentale est menacée rien moins que cela par une conspiration
sataniste. Les Forces du Mal sont à l'uvre : en clair les sectateurs du
Malin veulent se faire la peau de l'Agnus dei ! à l'occasion d'Halloween.
Écoutons cette belle leçon d'humanisme mystique, aux doux relents d'une certaine
nostalgie, celle du Moyen Âge où l'église savait effectivement traiter par les moyens
les plus appropriés les relaps, hérétiques, sorciers et autres suspects de déviances
théologiques : par la torture, les bûchers, les massacres. N'oublions point
que pour sauver l'âme, l'église dans son message universel d'amour n'a jamais hésité
à tuer, à grande échelle, directement ou indirectement. Par l'usage du bras séculier,
le recours au bourreau, ou par l'inoculation du plus infect des virus de l'arsenal
bio-terroriste : la haine de soi, la culpabilité. Bref, écoutons ce mort qui
parle, ce nostalgique du Saint-Office, de la congrégation de l'index, du Syllabus et des
procès en excommunication. Le christianisme n'est après tout qu'une religion de la mort
qui se donne pour celle de l'amour. Il y a juste un problème : depuis deux
mille ans les forces du mensonge théologique commencent à s'épuiser
d'où la
hargne du prélat contre une éventuelle concurrence concurrence déloyale
bien sûr. Alors comment fourguer sa came, comment continuer à vendre le fantôme
sinistre du Nazaréen ?
Ainsi, d'après le quotidien Nice Matin du 31/10/99 :
« Depuis trois ou quatre ans la fête d'Halloween connaît un succès croissant chez
nous. Le mot signifie "veille de Toussaint", le contenu est d'origine gauloise
et païenne. »
Diantre ! le paganisme est de retour mais que fait donc Torquemada ? qu'attend
le saint-siège pour réactiver l'inquisition ? ou du moins lancer une croisade pour
éliminer tous ces mécréants, païens, hédonistes qui ne croient plus à l'enfer et aux
diktats de l'homme en blanc, à Rome
« Il s'agit à la fois de conjurer les esprits mauvais
et de faire peur en imitant les défunts, comme si leurs fantômes revenaient pour nous
menacer de mort. Tout ce qui fait peur et sent la mort vient du Démon. »
Disons-le carrément : on se fout d'halloween, manifestation grotesque car
américaine et mercantile. Pour le néocapitalisme libéral, à visage inhumain, si
l'image de la mort fait vendre, tant mieux
Ce n'est pas exactement notre problème.
L'exhortation du prêtre est, cependant, intéressante : la peur et l'odeur de
la mort seraient d'essence démoniaque ! tiens donc ! intéressante perspective
pour une religion qui pratique assidûment la nécrophagie, le culte des saints, de leurs
ossements, de leurs momies et autres reliques.
Mais qu'est-ce qui sent la mort, sinon le christianisme ? Religion de l'ombre,
obsédée par le sang, le martyre, la peur, la Faute, le pêché ? C'est après tout
cette même église qui a inventé l'Enfer
pour ceux qui transgressaient ses
vérités et interdits !
Autre chose à ajouter : le satanisme on s'en fout
tout autant qu'halloween : une religion inversée reste une religion c'est à dire un
mensonge, une forme vicieuse de névrose collective. Blasphémer Dieu c'est d'une certaine
manière, le reconnaître. (1)
À quoi bon reconnaître le néant ?
Dans sa vertueuse indignation le prêtre donne dans le
registre "offensive culturelle". Tremblez pauvres pêcheurs l'Apocalypse est
proche !
« Qu'on le sache, halloween est d'ailleurs la fête la plus importante pour les
satanistes du monde entier. Cette fête et ces rites n'ont rien à voir avec notre culture
méditerranéenne. »
Selon le spécialiste du droit canon c'est rien moins que l'identité occidentale qui est
menacée. On se demande ici si l'idiotie l'emporte sur le délire ou le
contraire. Réflexe de secte menacée dans son fonds de commerce. En l'espèce, le marché
de la peur, celui qui permet de vendre chèrement les promesses de vie éternelle. Et qui
devient l'objet d'une concurrence féroce. Dieu est mort mais pas les sectes !
Quant à la dérisoire référence à une culture morte, la culture gréco-romaine et
chrétienne, disons que nous la haïssons d'autant plus qu'elle a légitimé les massacres
et l'horreur. Et que cela continue
Pour combien de temps, au fait ?
(1)
Sauf dans le cas de Sade. Mais Sade est pour le moins à part.