Numéro 6

  
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Leurs crânes sont des tambours...

Le journal qui mord et fuit...  

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Sommaire

   
 Les médias c'est la guerre ! ouverture du dossier

 La laisse d'or : Josyanne Savigneau

 Pour relire pas relu : A. Adler

 Faire un président à l'américaine

  PLPL rééduque la presse : « 11 septembre »

 Les Sardons parlent aux Sardons

 Dossier : Les pyromanes de l’insécurité

PLPL vous offre un matraquage

 Affiche PLPL

 Brèves moustachues

 Europropagande

 Les MédiAttac

 Document PLPL :
Décryptage d’un sondage du Monde (qui ment)

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  dossier

L’AUTRE GUERRE DES MÉDIAS

 

Les pyromanes de l’insécurité

« Insécurité » sur tous les fronts. « Une véritable scène de guerre urbaine », « La nouvelle guerre » : le premier titre (France Inter) renvoie à un tir de bazooka à Béziers, le second (Le Figaro) à une double frappe chirurgicale à New York. Les sujets changent, le matraquage demeure. Après la pensée unique – l’économie, c’est le marché –, la presse découvre la déclinaison unique : l’« insécurité » quel que soit le sujet.
En 1997, le gouvernement Jospin choisissait de masquer son libéralisme économique par l’interventionnisme policier. Privatisations d’un côté, Vigipirate de l’autre. Quatre ans plus tard, au moment d’expirer, englouti sous un amas de barbe molle, le parti communiste vend L’Humanité à Matra-Hachette et se déclare « solidaire » des maîtres du Pentagone.
Le parti de la presse et de l’argent (PPA) ne se contente plus de relater les croisades sécuritaires. Il les mène en première ligne, tambour battant. Robert Solé, médiateur du Quotidien vespéral des marchés, fait le paon : « La rédaction du Monde a décrété la mobilisation générale. » (QVM, 16-17.9.01)
Elle n’est pas la seule.
Sur France Inter, le 6 septembre dernier, un auditeur excédé par l’endoctrinement sécuritaire interpellait un journaliste galonné : « Moi je me dis que si demain il y avait la même médiatisation sur l’écart grandissant entre les rémunérations des salaires et du capital, dans les sondages les Français diraient que le problème numéro un c’est l’augmentation des salaires. » On lui coupa la parole. Pour la donner à un commissaire de police. Depuis, cet auditeur a rejoint les camps d’entraînement de PLPL. Et ce qu’il n’a pas pu dire, c’est ce qui suit…
    

 

Quand les médias (qui mentent) ont oublié, PLPL se souvient. C’était il y a dix-sept ans. Le 29 octobre 1984, Jean-Pierre Destrade, porte-parole d’un parti socialiste dont Lionel Jospin est alors le premier secrétaire, donne de la voix : « Il est urgent que le gouvernement s’engage plus résolument dans le combat contre l’insécurité. » Destrade exige davantage de « fermeté », « des peines incompressibles pour certains criminels, une réduction encore plus notable du nombre de permissions de sortir et des libérations conditionnelles », sans oublier « un plan d’équipement de la police » (QVM, 01.11.84). Le président de la Ligue des droits de l’homme s’avoue « consterné » : « Ces déclarations sont imprégnées de l’idéologie sécuritaire la plus réactionnaire. Il est stupéfiant de voir les théories de l’extrême droite reprises en compte par une certaine gauche. »

Nul ne serait stupéfié aujourd’hui… Demandeur de « peines incompressibles pour certains criminels », Jean-Pierre Destrade peut se féliciter de n’avoir pas été tout à fait entendu à l’époque. Car, grâce au « laxisme » judiciaire ambiant, il n’eut pas eu à purger l’intégralité de sa peine de prison… Il est vrai qu’il avait eu l’habileté de voler un bœuf plutôt qu’un œuf, s’engraissant personnellement grâce aux énormes dessous-de-table versés au parti socialiste par des hypermarchés.

Parce qu’ils ont pris place dans une croisade sécuritaire et guerrière nauséabonde, les médias (qui mentent) au service des patrons (qui plastronnent) s’abstiennent d’évoquer ce genre de souvenirs. Pourtant, on le sait à présent, la plupart de ceux qui, moustache au clair, ont glapi en faveur de la loi et l’ordre se sont révélés être des fripouilles. Tel ancien maire de Nice, proche du Front national, ne cessait de réclamer davantage de police et de poigne… jusqu’au jour où les tribunaux l’ont contraint à aller dépenser en Uruguay les sommes extorquées à ses administrés. Tel autre champion de la « lutte contre l’insécurité », réélu maire RPR d’une ville détenant le record de caméras de surveillance au centimètre carré, restera célèbre pour avoir tout à la fois utilisé des employés municipaux à titre de domestiques personnels et contraint, pistolet au poing, une malheureuse à lui faire une fellation. Tel ancien ministre de la Justice, théoricien sécuritaire du RPR dans les années 1980, a fini mis en examen, le 30 août dernier, pour « recel d’abus de biens sociaux ».

Gauche plurielle :
de Robert Hue à Robert Pandraud

Lionel Jospin a récemment distingué Robert Pandraud, député RPR de Seine-Saint-Denis, en lui confiant une mission de réflexion destinée à « élaborer un nouvel instrument statistique de l’insécurité. » Dans Le Point du 13 juillet 2001, Pandraud fut aussitôt décrété « en forme ». PLPL rappelle les états de service du nouveau conseiller de Jospin : c’est au moment où Pandraud était ministre délégué chargé de la Sécurité dans le gouvernement Chirac que furent renforcés les pouvoirs de la police sous couvert de lutte contre le « terrorisme » ; qu’on utilisa massivement les camps de rétention, créés par la gauche, pour regrouper les étrangers en instance de reconduite à la frontière ; qu’une réforme du code de la nationalité permit de trier plus facilement ceux qui « méritaient » d’être Français ; que furent institués le système des repentis et la pratique de la délation rémunérée ; qu’on revint de fait à une juridiction politique d’exception, laquelle s’« illustra » à l’occasion du procès d’Action directe 1.

Et PLPL n’oublie pas non plus qu’en décembre 1986, quinze ans avant les exploits de la police italienne à Gênes, Malik Oussekine fut matraqué à mort par une brigade de voltigeurs français galvanisés par les discours de Pandraud. Est-ce un tel bilan qui lui a valu d’être promu statisticien de l’insécurité par le gouvernement de la gauche plurielle, communistes et écologistes compris ?

Non, car il fut jugé insuffisant. Actuel porte-parole du parti socialiste, Vincent Peillon a ainsi reproché aux « braillards de la droite qui veulent exploiter le sentiment d’insécurité » de n’avoir « rien fait quand ils étaient au pouvoir ». (QVM, 05-06.08.01) Quelques jours plus tôt, au moment de l’assassinat du militant anticapitaliste Carlo Giuliani à Gênes, le petit braillard Peillon feignait pourtant l’indignation et dénonçait la « prise en otage » des manifestants de Gênes par « une police à la stratégie pour le moins douteuse ». Et il pleurnichait : « Nous aurions dû être à Gênes parce que les valeurs que défendent ces manifestants sont les nôtres. […] Les socialistes ne seront plus absents. » (Le Nouvel Observateur, 25.07.01)

En somme, ils tirent et ils pleurent. À moins que ce ne soit l’inverse. Les socialistes et leurs alliés s’apitoient sur un manifestant tué par la police puis ils arment la police qui tuera les manifestants.

Le Nouvel Observateur, 24-30/05/2001

Le dictateur de l’hebdomadaire Marianne, Jean-François Kahn, n’a pas tous ces scrupules. Aussi favorable à la répression chez Berlusconi que dans les banlieues françaises, il siffle de rage : « Les méthodes débiles des anarcho-casseurs, si privilégiées par les médias [sic], et que la gauche bourgeoise n’a pas hésité à caresser dans le sens du poil [re-sic], sont répugnantes. Elles le sont à Gênes, mais aussi dans nos cités. » Les lecteurs de PLPL comprendront à quel point les médias « privilégient » la contestation radicale quand ils sauront que : « La tactique des Black-Blocks, c’est “mords et fuis”. 2 »

Fuir ? Comment y parvenir dans une Europe qui se construit chaque jour un peu plus autour de la police et de l’argent (euro), de la police pour protéger les détenteurs d’argent ? Otto Schily, ministre allemand de l’Intérieur, a proposé la création d’une « police anti-émeute européenne. » Si demain elle intervient dans « nos cités », Jean-François Kahn s’avouera comblé…

Interrogé le 28 août 2001 sur TF1, le Premier ministre Lionel Jospin avait rappelé le sens de la « lutte collective » menée depuis 1997 : « gagner la bataille de l’insécurité. » Il y a deux ans, l’ancien ministre Pierre Pasquini et le député UDF Arthur Paecht jalousaient déjà la surenchère policière de l’axe socialo-citoyenno-vert-huiste et interrogeaient : « Croit-on qu’il faille, sans réagir, laisser la gauche être sécuritaire à notre place ? » (Le Figaro, 26.01.99) François Goulard, secrétaire politique de Démocratie libérale (DL, madeliniste) cherchait à les rassurer : « Nous pouvons encore attaquer le gouvernement sur le problème de l’insécurité. » (L’Express, 01.06.00) Le petit traître balladurien Nicolas Sarkozy leur fit écho quelques mois plus tard : « La prison doit être un élément majeur de notre politique de sécurité. » (Le Point, 31.08.01)

La suite

Figaro Magazine, 28/07/2001

1. Lire Jean-Paul Jean, « Le libéralisme autoritaire », Le Monde diplomatique, octobre 1987.
2. « Les casseurs du G8. Qui sont-ils ? Que veulent-ils ? Jusqu’où iront-ils ? », Le Figaro-magazine, 28 juillet 2001.
3. Alors directeur d’un obscur institut de sondage raminagrobique, le Cecop.
   

 
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