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Le Monde des débats inaugure une nouvelle formule dirigée par Jean Daniel. Dans son éditorial « Quel monde, quels débats ? » (01.2001), la ganache rocardienne cherche à donner un sens à la logorrhée intellectuelle dont il oriente désormais le jet. « Donc, Jacques Julliard et moi-même rejoignons aujourd’hui l’équipe qui, sous la direction de Michel Wieviorka, aura publié une vingtaine de numéros, dont pratiquement tous traduisaient nos préoccupations. […] Et, pour inaugurer cette direction à laquelle on a bien voulu me convier, comme pour célébrer le nouveau siècle, mes nouveaux amis et nos lecteurs me permettront de leur proposer une sorte de “ce que je crois” subjectif, partiel, résultat de l’enseignement d’un bien long parcours : quelques variations en somme sur les trois mots de notre nouveau titre, le monde, le débat, Le Nouvel Observateur. Le monde est le lieu d’un débat, lequel est à son tour devenu un monde. Ce n’est pas pour rien que, succédant aux grandes revues idéologiques de jadis, une prestigieuse publication porte ce nom, Le Débat. Ce n’est pas pour rien non plus qu’un grand quotidien conservateur, Le Figaro, décide d’annoncer à la “une”, et de manière spectaculaire, une série de grands entretiens sur la possibilité en France de débattre. Ce n’est pas pour rien, enfin, que tous les journaux et périodiques, “culturels” ou pas, optent dans la présentation de leur publication pour un net primat des “tribunes” sur les éditoriaux. Nous étions dans l’ère des certitudes et des injonctions. Nous sommes dans celle de la complexité et du questionnement. […] Nous avons à prendre tous les risques de l’imaginaire pour affronter le complexe et le contradictoire. […] Un intellectuel est celui qui, avant tout, cherche dans la discrétion et le silence la vérité des faits et l’opportunité de leur interprétation. […] Oui, mille fois oui au RMI. Mais comment espérer d’un ancien salarié qu’il fera tout pour retrouver sa dignité sociale, s’il gagne plus à ne rien faire qu’à chercher un travail mal rémunéré ? […] Sur les États-Unis et sur le capitalisme, je suis autant heurté par le simplisme vindicatif des procès d’un Revel que par l’archaïsme des réquisitoires d’un Bourdieu. Je ne vois que trop bien la place qu’ils laissent et qu’il nous faut prendre. Ce n’est pas parce que l’on a renoncé a changer le monde qu’il ne faut pas essayer de le comprendre. […] Qu’il me soit permis maintenant d’énoncer les principes qui, selon moi, séparent les journalistes intellectuels de tous les autres […] : accompagner le lecteur dans une recherche de la vérité et non le sommer de prendre parti ; essayer d’analyser les situations avant de condamner les hommes : ne pas considérer que tout est politique et donc moral ; s’installer enfin dans la complexité pour l’épouser avant de la réduire parce que le fait, le réel, l’événement est par nature complexe. Relater plutôt que sermonner et complexer l’éthique de conviction par l’éthique de responsabilité : voilà quels sont nos commandements, notre catéchisme, pour le journalisme, qu’il soit culturel, intellectuel ou politique. Vaste ambition. D’abord vaste débat ! »
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